ArsĂšneLupin- lecture en cm2. 19 mars 2021 enseignant CM2. En classe, les cm2 ont dĂ©couvert le cĂ©lĂšbre gentleman cambrioleur de Maurice Leblanc. Nous avons dĂ©couvert l’histoire de ce personnage et le dĂ©but de ses aventures. Nous n’avons pas eu le temps de lire la fin de la premiĂšre nouvelle « L’arrestation d’ArsĂšne Lupin ArsĂšne Lupin, gentleman cambrioleur de Maurice Leblanc Analyse de l'oeuvre - RĂ©sumĂ© complet et analyse dĂ©taillĂ©e de l'oeuvre DĂ©cryptez ArsĂšne Lupin, gentleman cambrioleur de Maurice Leblanc avec l'analyse du PetitLitteraire. fr ! Que faut-il retenir de ArsĂšne Lupin, gentleman... Lire la suite 9,99 € Neuf Ebook TĂ©lĂ©chargement immĂ©diat 4,99 € ExpĂ©diĂ© sous 2 Ă  4 semaines LivrĂ© chez vous entre le 2 septembre et le 16 septembre DĂ©cryptez ArsĂšne Lupin, gentleman cambrioleur de Maurice Leblanc avec l'analyse du PetitLitteraire. fr ! Que faut-il retenir de ArsĂšne Lupin, gentleman cambrioleur ? Retrouvez tout ce que vous devez savoir sur cette oeuvre dans une analyse complĂšte et dĂ©taillĂ©e. Vous trouverez notamment dans cette fiche - Un rĂ©sumĂ© complet - Une prĂ©sentation des personnages principaux - Une analyse des spĂ©cificitĂ©s de l'oeuvre Une analyse de rĂ©fĂ©rence pour comprendre rapidement le sens de l'oeuvre. A propos de la collection LePetitLitteraire. fr PlĂ©biscitĂ© tant par les passionnĂ©s de littĂ©rature que par les lycĂ©ens, LePetitLittĂ©raire. fr est considĂ©rĂ© comme une rĂ©fĂ©rence en matiĂšre d'analyse d'oeuvres classiques et contemporaines. Nos analyses, disponibles au format papier et numĂ©rique, ont Ă©tĂ© conçues pour guider les lecteurs Ă  travers la littĂ©rature. Nos auteurs combinent thĂ©ories, citations, anecdotes et commentaires pour vous faire dĂ©couvrir et redĂ©couvrir les plus grandes oeuvres littĂ©raires. http //www. lepetitlitteraire. fr Date de parution 31/12/2021 Editeur Collection ISBN 978-2-8080-2424-2 EAN 9782808024242 PrĂ©sentation BrochĂ© Nb. de pages 38 pages Poids Kg Dimensions 17,0 cm × 11,0 cm × 0,2 cm
Quest-ce-que les voleurs ont emportĂ©? ArsĂšne Lupin, le cĂ©lĂšbre gentleman-cambrioleur, est-il mort? Isidore Beautrelet, un jeune lycĂ©en, mĂšne l'enquĂȘte. DĂ©couvrira-t-il le secret d'ArsĂšne Lupin et celui de l'Aiguille creuse? Librairie Cheminant Librairie Papeterie CD DVD 1000 mÂČ de culture Ă  Vannes. La librairie; Livres numĂ©riques; Nous Ă©crire; Rechercher :
La fiche sur le site Tome 1 En cette annĂ©e 2015, les Ă©ditions Kurokawa aiment la littĂ©rature française ! AprĂšs l'excellente adaptation des MisĂ©rables par Takahiro Arai en dĂ©but d'annĂ©e, l'Ă©diteur nous propose de dĂ©couvrir l'adaptation manga d'un autre sommet de notre Histoire littĂ©raire, mais dans un tout autre genre ArsĂšne Lupin, la saga de Maurice Leblanc nĂ©e il y a tout juste 110 ans, et qui a fondĂ© tout un sous-genre du rĂ©cit policier en mettant en scĂšne un gentleman cambrioleur devenu culte. Aux dessins, on dĂ©couvre Takashi Morita, mangaka qui n'en est pas Ă  son coup d'essai sur Lupin avant cette adaptation manga entamĂ©e en 2013 dans le magazine Gekkan Hero's de ShĂŽgakukan, il en a dessinĂ© une autre entre 2011 et 2013, qui a Ă©tĂ© stoppĂ©e aprĂšs 5 volumes. Dans cette seconde sĂ©rie, Morita adaptera les histoires de Lupin sortie dans le cadre de ce qu'il appelle la saga principale d'ArsĂšne Lupin, ce qui visiblement devrait donc nous emmener des toutes premiĂšres aventures du cĂ©lĂšbre voleur jusqu'au rĂ©cit "Les Dents du Tigre", en passant notamment par les cultissimes "L'Aiguille Creuse" et "813". Chaque tome proposant une adaptation de l'une des histoires de Maurice Leblanc, il n'est aucunement nĂ©cessaire de connaĂźtre la premiĂšre sĂ©rie manga de toute façon inĂ©dite en France Ă  ce jour pour apprĂ©cier cette seconde sĂ©rie. Bien au contraire, puisque Morita, ici, repart en quelque sorte du dĂ©but en proposant un rĂ©cit qui s'avĂšre parfait pour commencer. Et ce n'est pas l'un des romans qu'il a choisi d'adapter, mais "Le diadĂšme de la Princesse de Lamballe", une piĂšce de théùtre Ă©crite quand la saga de Maurice Leblanc commençait Ă  rencontrer le succĂšs. Nous y plongeons aux cĂŽtĂ©s de personnalitĂ©s gĂątĂ©es par la sociĂ©tĂ© Germaine Gournay-Martin, fille du richissime Gournay-Martin, va prochainement Ă©pouser le duc de Charmerace, son fiancĂ© rĂ©cemment revenu d'une expĂ©dition au PĂŽle Sud aprĂšs 7 ans d'absence. La jeune demoiselle, qui n'a toujours connu que l'aisance, est on ne peut plus hautaine, et mĂȘme dĂ©sagrĂ©able avec ses fausses amies ou avec Sonia, sa demoiselle de compagnie. Et face Ă  l'absence trĂšs longue de son fiancĂ©, elle fut mĂȘme tentĂ©e d'aller fricoter avec son cousin... Son pĂšre, quant Ă  lui, est un nouveau bourgeois qui a pu s'enrichir en profitant de la rĂ©volution industrielle, et qui profite dĂ©sormais de sa fortune pour agrandir constamment sa collection d'oeuvres d'art, notamment en peinture. HĂ©las pour lui, quelques annĂ©es auparavant, il fut la victime du plus grand voleur du pays, Ă©chappant Ă  la justice ou s'Ă©vadant depuis une dizaine d'annĂ©es le dĂ©nommĂ© ArsĂšne Lupin, qui lui a dĂ©robĂ© une bonne partie de sa collection ! Mais dĂ©sormais, le duc est revenu, le mariage avec Germaine est en route... mais les choses commencent Ă  basculer de nouveau quand, au chĂąteau de Charmerace, arrive une lettre. Elle st signĂ©e ArsĂšne Lupin, et elle prĂ©vient Mr Gournay-Martin qu'il reviendra bientĂŽt dĂ©rober de nouvelles oeuvres d'art, Ă  commencer par le diadĂšme de la Princesse de Lamballe, le bien le plus prĂ©cieux de millionnaire, qu'ils conserve prĂ©cieusement dans un endroit secret, et que Lupin n'avait pu dĂ©rober quelques annĂ©es auparavant... S'il est facile de connaĂźtre les romans d'ArsĂšne Lupin, il est sans doute moins aisĂ© de connaĂźtre la piĂšce de théùtre inspirant l'histoire de ce premier tome. Rien que pour ça, la version manga vaut le coup, malgrĂ© le grand classicisme de ce rĂ©cit. Mais qui dit classicisme ne dit pas forcĂ©ment absence de qualitĂ©, et le scĂ©nario du "DiadĂšme de la Princesse de Lamballe" Ă©tait tout simplement parfait en guise de premier tome, car il profite trĂšs bien de son scĂ©nario simple pour prĂ©senter toutes les facettes qui ont fait d'ArsĂšne Lupin un personnage fascinant ayant traversĂ© les dĂ©cennies en conservant sa popularitĂ©. Au fil de cette affaire de vol qui ne se veut pas surprenante, l'occasion nous est donnĂ©e d'apprĂ©cier tout l'intellect de Lupin, puisque nous voyons qu'il a pensĂ© son plan de vol du diadĂšme d'un bout Ă  l'autre... et sur plusieurs annĂ©es ! Et cet intellect ne serait rien sans la maestria de l'homme dans l'art du dĂ©guisement, son don pour manipuler Ă  sa guise ses cibles afin de leur faire faire des erreurs, sa façon de s'entourer d'acolytes fiables, l'attirance qu'il exerce sur les femmes, son jeu d'acteur et son self-control quasiment parfaits face Ă  l'ennemi... et son goĂ»t profond pour le danger, car prendrait-il autant de plaisir dans ses vols s'il ne s'amusait pas Ă  titiller de trĂšs prĂšs ses adversaires ? Mais ArsĂšne Lupin, c'est Ă©galement une certaine forme de justice, celle d'un homme ne volant que les plus riches et venant volontiers en aide aux plus dĂ©munis, Ă  une Ă©poque oĂč les inĂ©galitĂ©s sociales restaient fortes. L'homme est-il parfait ? Non, il lui arrive tout de mĂȘme de faire des erreurs, le poussant ainsi Ă  revoir ses plans dans l'urgence, notamment parce que l'une de ses plus grosses faiblesses rĂ©side justement dans les femmes qu'il attire Ă  lui. A ce titre, dans ce premier tome un personnage cristallise parfaitement Ă  la fois son dĂ©sir d'aider les dĂ©munis et son attirance envers la gente fĂ©minine la douce Sonia, jeune femme aussi charmante qu'attachante bien qu'elle soit un clichĂ© du genre. Mais nous ne vous en dirons pas plus... Enfin, si commencer le manga en adaptant cette piĂšce de théùtre est si intĂ©ressant, c'est Ă©galement parce qu'elle offre une bonne vision du passĂ© et de l'enfance de Lupin venant expliquer en partie pourquoi il est devenu ce qu'il est, qu'elle voit la toute premiĂšre apparition du personnage de Victoire qui sera ensuite rĂ©current dans d'autres romans de Lupin, et qu'elle propose de mettre en place de façon marquante l'Ă©ternel ennemi de Lupin l'inspecteur de police Ganimard, poursuivant le cambrioleur depuis des annĂ©es au point de dĂ©sormais avoir qu'il faut toujours se mĂ©fier de lui, et possĂ©dant un flair et une expĂ©rience souvent susceptibles de mettre Ă  mal les plans de notre hĂ©ros... Son rĂŽle ici est marquant grĂące Ă  ce flair, Ă  son sens de la dĂ©duction, et Ă  l'opposition finale riche en tension entre Lupin et lui ! Suivant de trĂšs prĂšs le scĂ©nario original, Takashi Morita en profite Ă©galement pour couvrir briĂšvement d'autres rĂ©cits importants pour bien poser le personnage et son entourage le premier recueil de nouvelles d'"ArsĂšne Lupin gentleman cambrioleur", et "La dame blonde", l'un des deux Ă©pisodes du livre "ArsĂšne Lupin contre Herlock SholmĂšs". Une construction maligne, qui permet notamment au mangaka d'Ă©voquer les Ă©vasions passĂ©es de Lupin, et ses prĂ©cĂ©dents diffĂ©rents avec Helrock SholmĂšs, personnage qui sera au coeur du deuxiĂšme tome du manga. Pour parfaire son rĂ©cit, Morita emballe le tout dans une narration d'orfĂšvre. La construction est impeccable, met tout en place d'excellente façon, dĂ©roule le scĂ©nario sans rĂ©el temps mort alors que le tome fait 250 pages assez bavardes... Le mangaka en profite aussi pour resituer clairement le contexte de la Belle-Epoque, cette pĂ©riode faste situĂ©e entre la rĂ©volution industrielle et la premiĂšre guerre mondiale. A ce titre, ses dessins dĂ©livrent un Paris de dĂ©but de vingtiĂšme siĂšcle tout Ă  fait crĂ©dible, aux dĂ©cors extĂ©rieurs et intĂ©rieurs soignĂ©s sans qu'il soit fait insistance dessus. Les traits Ă©pais des personnages, eux, pourraient rebuter un peu au dĂ©part en s'alignant lĂ©gĂšrement des traits Ă©lancĂ©s que l'on prĂȘte gĂ©nĂ©ralement Ă  ArsĂšne Lupin, mais on s'y fait trĂšs vite tant l'ensemble profite d'une excellente expressivitĂ© pour faire ressortir le tempĂ©rament de chaque personnage La prestance, l'amusement face au danger et le charisme de Lupin, l'expĂ©rience d'un Ganimard au visage trĂšs marquĂ©, la douceur de Sonia, l'orgueil de la hautaine Germaine, le physique d'un Gournay-Martin que l'on adore voir se mettre dans tous ses Ă©tats... Et puis, Morita n'oublie pas les symboliques Haut-de-forme et monocle de Lupin ! Sur l'adaptation d'un scĂ©nario certes classique et un peu facile sur sa fin, mais qu'il maĂźtrise de bout en bout, Takashi Morita entame de la meilleure des maniĂšres son manga, avec ce premier rĂ©cit parfait pour tout mettre en place. L'excellente connaissance de la saga de Maurice Leblanc et la passion pour celle-ci se ressent totalement chez le mangaka, que ce soit dans sa prĂ©face, dans la façon de mener son rĂ©cit, ou dans les nombreuses informations de sa postface... Que vous connaissez dĂ©jĂ  les romans d'ArsĂšne Lupin ou non, tout est lĂ  pour contribuer au plaisir de lecture. Y compris l'Ă©dition française, qui s'offre une bonne qualitĂ© d'impression, une traduction au poil, plusieurs notes de traduction bien utiles sur l'Ă©poque, et un prix de 7,65€ tout Ă  fait honnĂȘte pour un pavĂ© de 250 pages.
\n \n arsĂšne lupin gentleman cambrioleur fiche de lecture
ArsĂšneLupin, le fantaisiste gentleman qui n’opĂšre que dans les chĂąteaux et les salons, et qui, une nuit, oĂč il avait pĂ©nĂ©trĂ© chez le baron Schormann, en Ă©tait parti les mains vides et 1Maurice Leblanc ARSÈNE LUPIN GENTLEMAN-CAMBRIOLEUR Nouvelles 1907 io n d u gr oup e E bo oks li br es et g ra tui ts » 2Table des matiĂšres – 1 – L’arrestation d’ArsĂšne Lupin ... 4 – 2 – ArsĂšne Lupin en prison ... 25 – 3 – L’évasion d’ArsĂšne Lupin ... 55 – 4 – Le mystĂ©rieux voyageur ... 85 – 5 – Le Collier de la Reine ... 109 – 6 – Le sept de cƓur ... 134 – 7 – Le coffre-fort de madame Imbert ... 188 É d it io n d u gr oup e E bo oks li br es et g ra tui ts » 3– 8 – La perle noire ... 205 – 9 – Herlock Sholmes arrive trop tard ... 227 ƒuvres de Maurice Leblanc ... 265 À propos de cette Ă©dition Ă©lectronique ... 267 4– 1 – L’arrestation d’ArsĂšne Lupin L’étrange voyage ! Il avait si bien commencĂ© cependant ! Pour ma part, je n’en fis jamais qui s’annonçùt sous de plus heureux auspices. La Provence est un transatlantique rapide, confortable, commandĂ© par le plus affable des hommes. La sociĂ©tĂ© la plus choisie s’y trouvait rĂ©unie. Des relations se formaient, des divertissements s’organisaient. Nous avions cette impression exquise d’ĂȘtre sĂ©parĂ©s du monde, rĂ©duits Ă  nous- mĂȘmes comme sur une Ăźle inconnue, obligĂ©s par consĂ©quent, de nous rapprocher les uns des autres. Et nous nous rapprochions
 Avez-vous jamais songĂ© Ă  ce qu’il y a d’original et d’imprĂ©vu dans ce groupement d’ĂȘtres qui, la veille encore, ne se connaissaient pas, et qui, durant quelques jours, entre le ciel infini et la mer immense, vont vivre de la vie la plus intime, ensemble vont dĂ©fier les colĂšres de l’OcĂ©an, l’assaut terrifiant des vagues et le calme sournois de l’eau endormie ? C’est, au fond, vĂ©cue en une sorte de raccourci tragique, la vie elle-mĂȘme, avec ses orages et ses grandeurs, sa monotonie et sa diversitĂ©, et voilĂ  pourquoi, peut-ĂȘtre, on goĂ»te avec une hĂąte fiĂ©vreuse et une voluptĂ© d’autant plus intense ce court voyage dont on aperçoit la fin du moment mĂȘme oĂč il commence. Mais, depuis plusieurs annĂ©es, quelque chose se passe qui ajoute singuliĂšrement aux Ă©motions de la traversĂ©e. La petite Ăźle 5flottante dĂ©pend encore de ce monde dont on se croyait affranchi. Un lien subsiste, qui ne se dĂ©noue que peu Ă  peu, en plein OcĂ©an, et peu Ă  peu, en plein OcĂ©an, se renoue. Le tĂ©lĂ©graphe sans fil ! appels d’un autre univers d’oĂč l’on recevrait des nouvelles de la façon la plus mystĂ©rieuse qui soit ! L’imagination n’a plus la ressource d’évoquer des fils de fer au creux desquels glisse l’invisible message. Le mystĂšre est plus insondable encore, plus poĂ©tique aussi, et c’est aux ailes du vent qu’il faut recourir pour expliquer ce nouveau miracle. Ainsi, les premiĂšres heures, nous sentĂźmes-nous suivis, escortĂ©s, prĂ©cĂ©dĂ©s mĂȘme par cette voix lointaine qui, de temps en temps, chuchotait Ă  l’un de nous quelques paroles de lĂ -bas. Deux amis me parlĂšrent. Dix autres, vingt autres nous envoyĂšrent Ă  tous, Ă  travers l’espace, leurs adieux attristĂ©s ou souriants. Or, le second jour, Ă  cinq cents milles des cĂŽtes françaises, par un aprĂšs-midi orageux, le tĂ©lĂ©graphe sans fil nous transmettait une dĂ©pĂȘche dont voici la teneur ArsĂšne Lupin Ă  votre bord, premiĂšre classe, cheveux blonds, blessure avant-bras droit, voyage seul, sous le nom de R
 » À ce moment prĂ©cis, un coup de tonnerre violent Ă©clata dans le ciel sombre. Les ondes Ă©lectriques furent interrompues. Le reste de la dĂ©pĂȘche ne nous parvint pas. Du nom sous lequel se cachait ArsĂšne Lupin, on ne sut que l’initiale. S’il se fĂ»t agi de toute autre nouvelle, je ne doute point que le secret en eĂ»t Ă©tĂ© scrupuleusement gardĂ© par les employĂ©s du poste tĂ©lĂ©graphique, ainsi que par le commissaire du bord et par le commandant. Mais il est de ces Ă©vĂ©nements qui semblent forcer la discrĂ©tion la plus rigoureuse. Le jour mĂȘme, sans qu’on 6pĂ»t dire comment la chose avait Ă©tĂ© Ă©bruitĂ©e, nous savions tous que le fameux ArsĂšne Lupin se cachait parmi nous. ArsĂšne Lupin parmi nous ! l’insaisissable cambrioleur dont on racontait les prouesses dans tous les journaux depuis des mois ! l’énigmatique personnage avec qui le vieux Ganimard, notre meilleur policier, avait engagĂ© ce duel Ă  mort dont les pĂ©ripĂ©ties se dĂ©roulaient de façon si pittoresque ! ArsĂšne Lupin, le fantaisiste gentleman qui n’opĂšre que dans les chĂąteaux et les salons, et qui, une nuit, oĂč il avait pĂ©nĂ©trĂ© chez le baron Schormann, en Ă©tait parti les mains vides et avait laissĂ© sa carte, ornĂ©e de cette formule ArsĂšne Lupin, gentleman- cambrioleur, reviendra quand les meubles seront authentiques. » ArsĂšne Lupin, l’homme aux mille dĂ©guisements tour Ă  tour chauffeur, tĂ©nor, bookmaker, fils de famille, adolescent, vieillard, commis-voyageur marseillais, mĂ©decin russe, torero espagnol ! Qu’on se rende bien compte de ceci ArsĂšne Lupin allant et venant dans le cadre relativement restreint d’un transatlantique, que dis-je ! dans ce petit coin des premiĂšres oĂč l’on se retrouvait Ă  tout instant, dans cette salle Ă  manger, dans ce salon, dans ce fumoir ! ArsĂšne Lupin, c’était peut-ĂȘtre ce monsieur
 ou celui-là
 mon voisin de table
 mon compagnon de cabine
 – Et cela va durer encore cinq fois vingt-quatre heures ! s’écria le lendemain miss Nelly Underdown, mais c’est intolĂ©rable ! J’espĂšre bien qu’on va l’arrĂȘter. Et s’adressant Ă  moi – Voyons, vous, monsieur d’AndrĂ©sy, qui ĂȘtes dĂ©jĂ  au mieux avec le commandant, vous ne savez rien ? 7J’aurais bien voulu savoir quelque chose pour plaire Ă  miss Nelly ! C’était une de ces magnifiques crĂ©atures qui, partout oĂč elles sont, occupent aussitĂŽt la place la plus en vue. Leur beautĂ© autant que leur fortune Ă©blouit. Elles ont une cour, des fervents, des enthousiastes. ÉlevĂ©e Ă  Paris par une mĂšre française, elle rejoignait son pĂšre, le richissime Underdown, de Chicago. Une de ses amies, lady Jerland, l’accompagnait. DĂšs la premiĂšre heure, j’avais posĂ© ma candidature de flirt. Mais dans l’intimitĂ© rapide du voyage, tout de suite son charme m’avait troublĂ©, et je me sentais un peu trop Ă©mu pour un flirt quand ses grands yeux noirs rencontraient les miens. Cependant, elle accueillait mes hommages avec une certaine faveur. Elle daignait rire de mes bons mots et s’intĂ©resser Ă  mes anecdotes. Une vague sympathie semblait rĂ©pondre Ă  l’empressement que je lui tĂ©moignais. Un seul rival peut-ĂȘtre m’eĂ»t inquiĂ©tĂ©, un assez beau garçon, Ă©lĂ©gant, rĂ©servĂ©, dont elle paraissait quelquefois prĂ©fĂ©rer l’humeur taciturne Ă  mes façons plus en dehors » de Parisien. Il faisait justement partie du groupe d’admirateurs qui entourait miss Nelly, lorsqu’elle m’interrogea. Nous Ă©tions sur le pont, agrĂ©ablement installĂ©s dans des rocking-chairs. L’orage de la veille avait Ă©clairci le ciel. L’heure Ă©tait dĂ©licieuse. – Je ne sais rien de prĂ©cis, mademoiselle, lui rĂ©pondis-je, mais est-il impossible de conduire nous-mĂȘmes notre enquĂȘte, tout aussi bien que le ferait le vieux Ganimard, l’ennemi personnel d’ArsĂšne Lupin ? – Oh ! oh ! vous vous avancez beaucoup ! 8– En quoi donc ? Le problĂšme est-il si compliquĂ© ? – TrĂšs compliquĂ©. – C’est que vous oubliez les Ă©lĂ©ments que nous avons pour le rĂ©soudre. – Quels Ă©lĂ©ments ? – 1. Lupin se fait appeler monsieur R
 – Signalement un peu vague. – 2. Il voyage seul. – Si cette particularitĂ© vous suffit. – 3. Il est blond. – Et alors ? – Alors nous n’avons plus qu’à consulter la liste des passagers et Ă  procĂ©der par Ă©limination. J’avais cette liste dans ma poche. Je la pris et la parcourus. – Je note d’abord qu’il n’y a que treize personnes que leur initiale dĂ©signe Ă  notre attention. – Treize seulement ? 9– En premiĂšre classe, oui. Sur ces treize messieurs R
, comme vous pouvez vous en assurer, neuf sont accompagnĂ©s de femmes, d’enfants ou de domestiques. Restent quatre personnages isolĂ©s le marquis de Kaverdan
 – SecrĂ©taire d’ambassade, interrompit miss Nelly, je le connais. – Le major Rawson
 – C’est mon oncle, dit quelqu’un. – M. Rivolta
 – PrĂ©sent, s’écria l’un de nous, un Italien dont la figure disparaissait sous une barbe du plus beau noir. Miss Nelly Ă©clata de rire. – Monsieur n’est pas prĂ©cisĂ©ment blond. – Alors, repris-je, nous sommes obligĂ©s de conclure que le coupable est le dernier de la liste. – C’est-Ă -dire ? – C’est-Ă -dire M. Rozaine. Quelqu’un connaĂźt-il M. Rozaine ? On se tut. Mais miss Nelly, interpellant le jeune homme taciturne dont l’assiduitĂ© prĂšs d’elle me tourmentait, lui dit – Eh bien, monsieur Rozaine, vous ne rĂ©pondez pas ? 10On tourna les yeux vers lui. Il Ă©tait blond. Avouons-le, je sentis comme un petit choc au fond de moi. Et le silence gĂȘnĂ© qui pesa sur nous m’indiqua que les autres assistants Ă©prouvaient aussi cette sorte de suffocation. C’était absurde d’ailleurs, car enfin rien dans les allures de ce monsieur ne permettait qu’on le suspectĂąt. – Pourquoi je ne rĂ©ponds pas ? dit-il, mais parce que, vu mon nom, ma qualitĂ© de voyageur isolĂ© et la couleur de mes cheveux, j’ai dĂ©jĂ  procĂ©dĂ© Ă  une enquĂȘte analogue et que je suis arrivĂ© au mĂȘme rĂ©sultat. Je suis donc d’avis qu’on m’arrĂȘte. Il avait un drĂŽle d’air, en prononçant ces paroles. Ses lĂšvres minces comme deux traits inflexibles s’amincirent encore et pĂąlirent. Des filets de sang striĂšrent ses yeux. Certes, il plaisantait. Pourtant sa physionomie, son attitude nous impressionnĂšrent. NaĂŻvement, miss Nelly demanda – Mais vous n’avez pas de blessure ? – Il est vrai, dit-il, la blessure manque. D’un geste nerveux il releva sa manchette et dĂ©couvrit son bras. Mais aussitĂŽt une idĂ©e me frappa. Mes yeux croisĂšrent ceux de miss Nelly il avait montrĂ© le bras gauche. Et, ma foi, j’allais en faire nettement la remarque, quand un incident dĂ©tourna notre attention. Lady Jerland, l’amie de miss Nelly, arrivait en courant. Elle Ă©tait bouleversĂ©e. On s’empressa autour d’elle, et ce n’est qu’aprĂšs bien des efforts qu’elle rĂ©ussit Ă  balbutier 11– Mes bijoux, mes perles !
 on a tout pris !
 Non, on n’avait pas tout pris, comme nous le sĂ»mes par la suite ; chose bien plus curieuse on avait choisi ! De l’étoile en diamants, du pendentif en cabochons de rubis, des colliers et des bracelets brisĂ©s, on avait enlevĂ©, non point les pierres les plus grosses, mais les plus fines, les plus prĂ©cieuses, celles, aurait-on dit, qui avaient le plus de valeur en tenant le moins de place. Les montures gisaient lĂ , sur la table. Je les vis, tous nous les vĂźmes, dĂ©pouillĂ©es de leurs joyaux comme des fleurs dont on eĂ»t arrachĂ© les beaux pĂ©tales Ă©tincelants et colorĂ©s. Et pour exĂ©cuter ce travail, il avait fallu, pendant l’heure oĂč lady Jerland prenait le thĂ©, il avait fallu, en plein jour, et dans un couloir frĂ©quentĂ©, fracturer la porte de la cabine, trouver un petit sac dissimulĂ© Ă  dessein au fond d’un carton Ă  chapeau, l’ouvrir et choisir ! Il n’y eut qu’un cri parmi nous. Il n’y eut qu’une opinion parmi tous les passagers, lorsque le vol fut connu c’est ArsĂšne Lupin. Et de fait, c’était bien sa maniĂšre compliquĂ©e, mystĂ©rieuse, inconcevable
 et logique cependant, car, s’il Ă©tait difficile de receler la masse encombrante qu’eĂ»t formĂ©e l’ensemble des bijoux, combien moindre Ă©tait l’embarras avec de petites choses indĂ©pendantes les unes des autres, perles, Ă©meraudes et saphirs ! Et au dĂźner, il se passa ceci Ă  droite et Ă  gauche de Rozaine, les deux places restĂšrent vides. Et le soir on sut qu’il avait Ă©tĂ© convoquĂ© par le commandant. 12Son arrestation, que personne ne mit en doute, causa un vĂ©ritable soulagement. On respirait enfin. Ce soir-lĂ  on joua aux petits jeux. On dansa. Miss Nelly, surtout, montra une gaietĂ© Ă©tourdissante qui me fit voir que si les hommages de Rozaine avaient pu lui agrĂ©er au dĂ©but, elle ne s’en souvenait guĂšre. Sa grĂące acheva de me conquĂ©rir. Vers minuit, Ă  la clartĂ© sereine de la lune, je lui affirmai mon dĂ©vouement avec une Ă©motion qui ne parut pas lui dĂ©plaire. Mais le lendemain, Ă  la stupeur gĂ©nĂ©rale, on apprit que, les charges relevĂ©es contre lui n’étant pas suffisantes, Rozaine Ă©tait libre. Fils d’un nĂ©gociant considĂ©rable de Bordeaux, il avait exhibĂ© des papiers parfaitement en rĂšgle. En outre, ses bras n’offraient pas la moindre trace de blessure. – Des papiers ! des actes de naissance ! s’écriĂšrent les ennemis de Rozaine, mais ArsĂšne Lupin vous en fournira tant que vous voudrez ! Quant Ă  la blessure, c’est qu’il n’en a pas reçu
 ou qu’il en a effacĂ© la trace ! On leur objectait qu’à l’heure du vol, Rozaine – c’était dĂ©montrĂ© – se promenait sur le pont. À quoi ils ripostaient – Est-ce qu’un homme de la trempe d’ArsĂšne Lupin a besoin d’assister au vol qu’il commet ? Et puis, en dehors de toute considĂ©ration Ă©trangĂšre, il y avait un point sur lequel les plus sceptiques ne pouvaient Ă©piloguer. Qui, sauf Rozaine, voyageait seul, Ă©tait blond, et portait un nom commençant par R ? Qui le tĂ©lĂ©gramme dĂ©signait-il, si ce n’était Rozaine ? 13Et quand Rozaine, quelques minutes avant le dĂ©jeuner, se dirigea audacieusement vers notre groupe, miss Nelly et lady Jerland se levĂšrent et s’éloignĂšrent. C’était bel et bien de la peur. Une heure plus tard, une circulaire manuscrite passait de main en main parmi les employĂ©s du bord, les matelots, les voyageurs de toutes classes M. Louis Rozaine promettait une somme de dix mille francs Ă  qui dĂ©masquerait ArsĂšne Lupin, ou trouverait le possesseur des pierres dĂ©robĂ©es. – Et si personne ne me vient en aide contre ce bandit, dĂ©clara Rozaine au commandant, moi, je lui ferai son affaire. Rozaine contre ArsĂšne Lupin, ou plutĂŽt, selon le mot qui courut, ArsĂšne Lupin lui-mĂȘme contre ArsĂšne Lupin, la lutte ne manquait pas d’intĂ©rĂȘt ! Elle se prolongea durant deux journĂ©es. On vit Rozaine errer de droite et de gauche, se mĂȘler au personnel, interroger, fureter. On aperçut son ombre, la nuit, qui rĂŽdait. De son cĂŽtĂ©, le commandant dĂ©ploya l’énergie la plus active. Du haut en bas, en tous les coins, la Provence fut fouillĂ©e. On perquisitionna dans toutes les cabines, sans exception, sous le prĂ©texte fort juste que les objets Ă©taient cachĂ©s dans n’importe quel endroit, sauf dans la cabine du coupable. – On finira bien par dĂ©couvrir quelque chose, n’est-ce pas ? me demandait miss Nelly. Tout sorcier qu’il soit, il ne peut faire que des diamants et des perles deviennent invisibles. 14– Mais si, lui rĂ©pondis-je, ou alors il faudrait explorer la coiffe de nos chapeaux, la doublure de nos vestes, et tout ce que nous portons sur nous. Et lui montrant mon Kodak, un 9 x 12 avec lequel je ne me lassais pas de la photographier dans les attitudes les plus diverses – Rien que dans un appareil pas plus grand que celui-ci, ne pensez-vous pas qu’il y aurait place pour toutes les pierres prĂ©cieuses de lady Jeriand ? On affecte de prendre des vues et le tour est jouĂ©. – Mais cependant j’ai entendu dire qu’il n’y a point de voleur qui ne laisse derriĂšre lui un indice quelconque. – Il y en a un ArsĂšne Lupin. – Pourquoi ? – Pourquoi ? parce qu’il ne pense pas seulement au vol qu’il commet, mais Ă  toutes les circonstances qui pourraient le dĂ©noncer. – Au dĂ©but, vous Ă©tiez plus confiant. – Mais depuis, je l’ai vu Ă  l’Ɠuvre. – Et alors, selon vous ? – Selon moi, on perd son temps. 15Et de fait, les investigations ne donnaient aucun rĂ©sultat, ou du moins, celui qu’elles donnĂšrent ne correspondait pas Ă  l’effort gĂ©nĂ©ral la montre du commandant lui fut volĂ©e. Furieux, il redoubla d’ardeur et surveilla de plus prĂšs encore Rozaine avec qui il avait eu plusieurs entrevues. Le lendemain, ironie charmante, on retrouvait la montre parmi les faux cols du commandant en second. Tout cela avait un air de prodige, et dĂ©nonçait bien la maniĂšre humoristique d’ArsĂšne Lupin, cambrioleur, soit, mais dilettante aussi. Il travaillait par goĂ»t et par vocation, certes, mais par amusement aussi. Il donnait l’impression du monsieur qui se divertit Ă  la piĂšce qu’il fait jouer, et qui dans la coulisse, rit Ă  gorge dĂ©ployĂ©e de ses traits d’esprit, et des situations qu’il imagine. DĂ©cidĂ©ment, c’était un artiste en son genre, et quand j’observais Rozaine, sombre et opiniĂątre, et que je songeais au double rĂŽle que tenait sans doute ce curieux personnage, je ne pouvais en parler sans une certaine admiration. Or, l’avant-derniĂšre nuit, l’officier de quart entendit des gĂ©missements Ă  l’endroit le plus obscur du pont. Il s’approcha. Un homme Ă©tait Ă©tendu, la tĂȘte enveloppĂ©e dans une Ă©charpe grise trĂšs Ă©paisse, les poignets ficelĂ©s Ă  l’aide d’une fine cordelette. On le dĂ©livra de ses liens. On le releva, des soins lui furent prodiguĂ©s. Cet homme, c’était Rozaine. 16C’était Rozaine assailli au cours d’une de ses expĂ©ditions, terrassĂ© et dĂ©pouillĂ©. Une carte de visite fixĂ©e par une Ă©pingle Ă  son vĂȘtement portait ces mots ArsĂšne Lupin accepte avec reconnaissance les dix mille francs de M. Rozaine. » En rĂ©alitĂ©, le portefeuille dĂ©robĂ© contenait vingt billets de mille. Naturellement, on accusa le malheureux d’avoir simulĂ© cette attaque contre lui-mĂȘme. Mais, outre qu’il lui eĂ»t Ă©tĂ© impossible de se lier de cette façon, il fut Ă©tabli que l’écriture de la carte diffĂ©rait absolument d l’écriture de Rozaine, et ressemblait au contraire, Ă  s’y mĂ©prendre, Ă  celle d’ArsĂšne Lupin, telle que la reproduisait un ancien journal trouvĂ© Ă  bord. Ainsi donc, Rozaine n’était plus ArsĂšne Lupin. Rozaine Ă©tait Rozaine fils d’un nĂ©gociant de Bordeaux ! Et la prĂ©sence d’ArsĂšne Lupin s’affirmait une fois de plus, et par quel acte redoutable ! Ce fut la terreur. On n’osa plus rester seul dans sa cabine, et pas davantage s’aventurer seul aux endroits trop Ă©cartĂ©s. Prudemment on se groupait entre gens sĂ»rs les uns des autres. Et encore, une mĂ©fiance instinctive divisait les plus intimes. C’est que la menace ne provenait pas d’un individu isolĂ©, et par lĂ  mĂȘme moins dangereux. ArsĂšne Lupin maintenant c’était
 c’était tout le monde. Notre imagination surexcitĂ©e lui attribuait un pouvoir miraculeux et illimitĂ©. On le supposait capable de prendre les dĂ©guisements les plus inattendus, d’ĂȘtre tour Ă  tour le respectable major Rawson ou le noble marquis de Raverdan, ou mĂȘme car on ne s’arrĂȘtait plus Ă  l’initiale accusatrice, ou mĂȘme telle ou telle personne connue de tous, ayant femme, enfants, domestiques. 17Les premiĂšres dĂ©pĂȘches sans fil n’apportĂšrent aucune nouvelle. Du moins le commandant ne nous en fit point part, et un tel silence n’était pas pour nous rassurer. Aussi, le dernier jour parut-il interminable. On vivait dans l’attente anxieuse d’un malheur. Cette fois, ce ne serait plus un vol, ce ne serait plus une simple agression, ce serait le crime, le meurtre. On n’admettait pas qu’ArsĂšne Lupin s’en tĂźnt Ă  ces deux larcins insignifiants. MaĂźtre absolu du navire, les autoritĂ©s rĂ©duites Ă  l’impuissance, il n’avait qu’à vouloir, tout lui Ă©tait permis, il disposait des biens et des existences. Heures dĂ©licieuses pour moi, je l’avoue, car elles me valurent la confiance de miss Nelly. ImpressionnĂ©e par tant d’évĂ©nements, de nature dĂ©jĂ  inquiĂšte, elle chercha spontanĂ©ment Ă  mes cĂŽtĂ©s une protection, une sĂ©curitĂ© que j’étais heureux de lui offrir. Au fond, je bĂ©nissais ArsĂšne Lupin. N’était-ce pas lui qui nous rapprochait ? N’était-ce pas grĂące Ă  lui que j’avais le droit de m’abandonner aux plus beaux rĂȘves ? RĂȘves d’amour et rĂȘves moins chimĂ©riques, pourquoi ne pas le confesser ? Les AndrĂ©sy sont de bonne souche poitevine, mais leur blason est quelque peu dĂ©dorĂ©, et il ne me paraĂźt pas indigne d’un gentilhomme de songer Ă  rendre Ă  son nom le lustre perdu. Et ces rĂȘves, je le sentais, n’offusquaient point Nelly. Ses yeux souriants m’autorisaient Ă  les faire. La douceur de sa voix me disait d’espĂ©rer. Et jusqu’au dernier moment, accoudĂ©s au bastingage, nous restĂąmes l’un prĂšs de l’autre, tandis que la ligne des cĂŽtes amĂ©ricaines voguait au-devant de nous. 18On avait interrompu les perquisitions. On attendait. Depuis les premiĂšres jusqu’à l’entrepont oĂč grouillaient les Ă©migrants, on attendait la minute suprĂȘme oĂč s’expliquerait enfin l’insoluble Ă©nigme. Qui Ă©tait ArsĂšne Lupin ? Sous quel nom, sous quel masque se cachait le fameux ArsĂšne Lupin ? Et cette minute suprĂȘme arriva. DussĂ©-je vivre cent ans, je n’en oublierais pas le plus infime dĂ©tail. – Comme vous ĂȘtes pĂąle, miss Nelly, dis-je Ă  ma compagne qui s’appuyait Ă  mon bras, toute dĂ©faillante. – Et vous ! me rĂ©pondit-elle, ah ! vous ĂȘtes si changĂ© ! – Songez donc ! cette minute est passionnante, et je suis heureux de la vivre auprĂšs de vous, miss Nelly. Il me semble que votre souvenir s’attardera quelquefois
 Elle n’écoutait pas, haletante et fiĂ©vreuse. La passerelle s’abattit. Mais avant que nous eussions la libertĂ© de la franchir, des gens montĂšrent Ă  bord, des douaniers, des hommes en uniforme, des facteurs. Miss Nelly balbutia – On s’apercevrait qu’ArsĂšne Lupin s’est Ă©chappĂ© pendant la traversĂ©e que je n’en serais pas surprise. – Il a peut-ĂȘtre prĂ©fĂ©rĂ© la mort au dĂ©shonneur, et plongĂ© dans l’Atlantique plutĂŽt que d’ĂȘtre arrĂȘtĂ©. – Ne riez pas, fit-elle, agacĂ©e. 19Soudain, je tressaillis, et, comme elle me questionnait, je lui dis – Vous voyez ce vieux petit homme debout Ă  l’extrĂ©mitĂ© de la passerelle
 – Avec un parapluie et une redingote vert-olive ? – C’est Ganimard. – Ganimard ? – Oui, le cĂ©lĂšbre policier, celui qui a jurĂ© qu’ArsĂšne Lupin serait arrĂȘtĂ© de sa propre main. Ah ! je comprends que l’on n’ait pas eu de renseignements de ce cĂŽtĂ© de l’OcĂ©an. Ganimard Ă©tait lĂ . Il aime bien que personne ne s’occupe de ses petites affaires. – Alors ArsĂšne Lupin est sĂ»r d’ĂȘtre surpris ? – Qui sait ? Ganimard ne l’a jamais vu, paraĂźt-il, que grimĂ© et dĂ©guisĂ©. À moins qu’il ne connaisse son nom d’emprunt
 – Ah ! dit-elle, avec cette curiositĂ© un peu cruelle de la femme, si je pouvais assister Ă  l’arrestation ! – Patientons. Certainement ArsĂšne Lupin a dĂ©jĂ  remarquĂ© la prĂ©sence de son ennemi. Il prĂ©fĂ©rera sortir parmi les derniers, quand l’Ɠil du vieux sera fatiguĂ©. Le dĂ©barquement commença. AppuyĂ© sur son parapluie, l’air indiffĂ©rent, Ganimard ne semblait pas prĂȘter attention Ă  la foule qui se pressait entre les deux balustrades. Je notai qu’un officier du bord, postĂ© derriĂšre lui, le renseignait de temps Ă  autre. 20Le marquis de Raverdan, le major Rawson, l’Italien Rivolta dĂ©filĂšrent, et d’autres, et beaucoup d’autres
 Et j’aperçus Rozaine qui s’approchait. Pauvre Rozaine ! Il ne paraissait pas remis de ses mĂ©saventures ! – C’est peut-ĂȘtre lui tout de mĂȘme, me dit miss Nelly
 Qu’en pensez-vous ? – Je pense qu’il serait fort intĂ©ressant d’avoir sur une mĂȘme photographie Ganimard et Rozaine. Prenez donc mon appareil, je suis si chargĂ©. Je le lui donnai, mais trop tard pour qu’elle s’en servĂźt. Rozaine passait. L’officier se pencha Ă  l’oreille de Ganimard, celui-ci haussa lĂ©gĂšrement les Ă©paules, et Rozaine passa. Mais alors, mon Dieu, qui Ă©tait ArsĂšne Lupin ? – Oui, fit-elle Ă  haute voix, qui est-ce ? Il n’y avait plus qu’une vingtaine de personnes. Elle les observait tour Ă  tour avec la crainte confuse qu’il ne fĂ»t pas, lui, au nombre de ces vingt personnes. Je lui dis – Nous ne pouvons attendre plus longtemps. Elle s’avança. Je la suivis. Mais nous n’avions pas fait dix pas que Ganimard nous barra le passage. 21– Eh bien, quoi ? m’écriai-je. – Un instant, monsieur, qui vous presse ? – J’accompagne mademoiselle. – Un instant, rĂ©pĂ©ta-t-il d’une voix plus impĂ©rieuse. Il me dĂ©visagea profondĂ©ment, puis il me dit, les yeux dans les yeux – ArsĂšne Lupin, n’est-ce pas ? Je me mis Ă  rire. – Non, Bernard d’AndrĂ©sy, tout simplement. – Bernard d’AndrĂ©sy est mort il y a trois ans en MacĂ©doine. – Si Bernard d’AndrĂ©sy Ă©tait mort, je ne serais plus de ce monde. Et ce n’est pas le cas. Voici mes papiers. – Ce sont les siens. Comment les avez-vous, c’est ce que j’aurai le plaisir de vous expliquer. – Mais vous ĂȘtes fou ! ArsĂšne Lupin s’est embarquĂ© sous le nom de R. – Oui, encore un truc de vous, une fausse piste sur laquelle vous les avez lancĂ©s, lĂ -bas ! Ah ! vous ĂȘtes d’une jolie force, mon gaillard. Mais cette fois, la chance a tournĂ©. Voyons, Lupin, montre-toi beau joueur. 22J’hĂ©sitai une seconde. D’un coup sec il me frappa sur l’avant-bras droit. Je poussai un cri de douleur. Il avait frappĂ© sur la blessure encore mal fermĂ©e que signalait le tĂ©lĂ©gramme. Allons, il fallait se rĂ©signer. Je me tournai vers miss Nelly. Elle Ă©coutait, livide, chancelante. Son regard rencontra le mien, puis s’abaissa sur le kodak que je lui avais remis. Elle fit un geste brusque, et j’eus l’impression, j’eus la certitude qu’elle comprenait tout Ă  coup. Oui, c’était lĂ , entre les parois Ă©troites de chagrin noir, au creux du petit objet que j’avais eu la prĂ©caution de dĂ©poser entre ses mains avant que Ganimard ne m’arrĂȘtĂąt, c’était bien lĂ  que se trouvaient les vingt mille francs de Rozaine, les perles et les diamants de lady Jerland. Ah ! je le jure, Ă  ce moment solennel, alors que Ganimard et deux de ses acolytes m’entouraient, tout me fut indiffĂ©rent, mon arrestation, l’hostilitĂ© des gens, tout, hors ceci la rĂ©solution qu’allait prendre miss Nelly au sujet de ce que je lui avais confiĂ©. Que l’on eĂ»t contre moi cette preuve matĂ©rielle et dĂ©cisive, je ne songeais mĂȘme pas Ă  le redouter, mais cette preuve, miss Nelly se dĂ©ciderait-elle Ă  la fournir ? Serais-je trahi par elle ? perdu par elle ? Agirait-elle en ennemie qui ne pardonne pas, ou bien en femme qui se souvient et dont le mĂ©pris s’adoucit d’un peu d’indulgence, d’un peu de sympathie involontaire ? Elle passa devant moi. Je la saluai trĂšs bas, sans un mot. MĂȘlĂ©e aux autres voyageurs, elle se dirigea vers la passerelle, mon Kodak Ă  la main. 23Sans doute, pensai-je, elle n’ose pas, en public. C’est dans une heure, dans un instant, qu’elle le donnera. Mais arrivĂ©e au milieu de la passerelle, par un mouvement de maladresse simulĂ©e, elle le laissa tomber dans l’eau, entre le mur du quai et le flanc du navire. Puis, je la vis s’éloigner. Sa jolie silhouette se perdit dans la foule, m’apparut de nouveau et disparut. C’était fini, fini pour jamais. Un instant, je restai immobile, triste Ă  la fois et pĂ©nĂ©trĂ© d’un doux attendrissement, puis, je soupirai, au grand Ă©tonnement de Ganimard – Dommage, tout de mĂȘme, de ne pas ĂȘtre un honnĂȘte homme
 C’était ainsi qu’un soir d’hiver, ArsĂšne Lupin me raconta l’histoire de son arrestation. Le hasard d’incidents dont j’écrirai quelque jour le rĂ©cit avait nouĂ© entre nous des liens
 dirais-je d’amitiĂ© ? Oui, j’ose croire qu’ArsĂšne Lupin m’honore de quelque amitiĂ©, et que c’est par amitiĂ© qu’il arrive parfois chez moi Ă  l’improviste, apportant, dans le silence de mon cabinet de travail, sa gaietĂ© juvĂ©nile, le rayonnement de sa vie ardente, sa belle humeur d’homme pour qui la destinĂ©e n’a que faveurs et sourires. Son portrait ? Comment pourrais-je le faire ? Vingt fois j’ai vu ArsĂšne Lupin, et vingt fois c’est un ĂȘtre diffĂ©rent qui m’est apparu
 ou plutĂŽt, le mĂȘme ĂȘtre dont vingt miroirs m’auraient renvoyĂ© autant d’images dĂ©formĂ©es, chacune ayant ses yeux particuliers, sa forme spĂ©ciale de figure, son geste propre, sa silhouette et son caractĂšre. 24– Moi-mĂȘme, me dit-il, je ne sais plus bien qui je suis. Dans une glace je ne me reconnais plus. Boutade, certes, et paradoxe, mais vĂ©ritĂ© Ă  l’égard de ceux qui le rencontrent et qui ignorent ses ressources infinies, sa patience, son art du maquillage, sa prodigieuse facultĂ© de transformer jusqu’aux proportions de son visage, et d’altĂ©rer le rapport mĂȘme de ses traits entre eux. – Pourquoi, dit-il encore, aurais-je une apparence dĂ©finie ? Pourquoi ne pas Ă©viter ce danger d’une personnalitĂ© toujours identique ? Mes actes me dĂ©signent suffisamment. Et il prĂ©cise, avec une pointe d’orgueil – Tant mieux si l’on ne peut jamais dire en toute certitude Voici ArsĂšne Lupin. L’essentiel est qu’on dise sans crainte d’erreur ArsĂšne Lupin a fait cela. Ce sont quelques-uns de ces actes, quelques-unes de ces aventures que j’essaie de reconstituer, d’aprĂšs les confidences dont il eut la bonne grĂące de me favoriser, certains soirs d’hiver, dans le silence de mon cabinet de travail
 25– 2 – ArsĂšne Lupin en prison Il n’est point de touriste digne de ce nom qui ne connaisse les bords de la Seine, et qui n’ait remarquĂ©, en allant des ruines de JumiĂšges aux ruines de Saint-Wandrille, l’étrange petit chĂąteau fĂ©odal du Malaquis, si fiĂšrement campĂ© sur sa roche, en pleine riviĂšre. L’arche d’un pont le relie Ă  la route. La base de ses tourelles sombres se confond avec le granit qui le supporte, bloc Ă©norme dĂ©tachĂ© d’on ne sait quelle montagne et jetĂ© lĂ  par quelque formidable convulsion. Tout autour, l’eau calme du grand fleuve joue parmi les roseaux, et des bergeronnettes tremblent sur la crĂȘte humide des cailloux. L’histoire du Malaquis est rude comme son nom, revĂȘche comme sa silhouette. Ce ne fut que combats, siĂšges, assauts, rapines et massacres. Aux veillĂ©es du pays de Caux, on Ă©voque en frissonnant les crimes qui s’y commirent. On raconte de mystĂ©rieuses lĂ©gendes. On parle du fameux souterrain qui conduisait jadis Ă  l’abbaye de JumiĂšges et au manoir d’AgnĂšs Sorel, la belle amie de Charles VII. Dans cet ancien repaire de hĂ©ros et de brigands, habite le baron Nathan Cahorn, le baron Satan, comme on l’appelait jadis Ă  la Bourse oĂč il s’est enrichi un peu trop brusquement. Les seigneurs du Malaquis, ruinĂ©s, ont dĂ» lui vendre, pour un morceau de pain, la demeure de leurs ancĂȘtres. Il y a installĂ© ses admirables collections de meubles et de tableaux, de faĂŻences et de bois sculptĂ©s. Il y vit seul, avec trois vieux domestiques. Nul n’y pĂ©nĂštre jamais. Nul n’a jamais contemplĂ© dans le dĂ©cor de 26ces salles antiques les trois Rubens, qu’il possĂšde, ses deux Watteau, sa chaire de Jean Goujon, et tant d’autres merveilles arrachĂ©es Ă  coups de billets de banque aux plus riches habituĂ©s des ventes publiques. Le baron Satan a peur. Il a peur non point pour lui, mais pour les trĂ©sors accumulĂ©s avec une passion si tenace et la perspicacitĂ© d’un amateur que les plus madrĂ©s des marchands ne peuvent se vanter d’avoir induit en erreur. Il les aime. Il les aime Ăąprement, comme un avare ; jalousement, comme un amoureux. Chaque jour, au coucher du soleil, les quatre portes bardĂ©es de fer, qui commandent les deux extrĂ©mitĂ©s du pont et l’entrĂ©e de la cour d’honneur, sont fermĂ©es et verrouillĂ©es. Au moindre choc, des sonneries Ă©lectriques vibreraient dans le silence. Du cĂŽtĂ© de la Seine, rien Ă  craindre le roc s’y dresse Ă  pie. Or, un vendredi de septembre, le facteur se prĂ©senta comme d’ordinaire Ă  la tĂȘte de pont. Et, selon la rĂšgle quotidienne, ce fut le baron qui entrebĂąilla le lourd battant. Il examina l’homme aussi minutieusement que s’il ne connaissait pas dĂ©jĂ , depuis des annĂ©es, cette bonne face rĂ©jouie et ces yeux narquois de paysan, et l’homme lui dit en riant – C’est toujours moi, monsieur le baron. Je ne suis pas un autre qui aurait pris ma blouse et ma casquette. – Sait-on Jamais ? murmura Cahorn. Le facteur lui remit une pile de journaux. Puis il ajouta – Et maintenant, monsieur le baron, il y a du nouveau. 27– Du nouveau ? – Une lettre
 et recommandĂ©e, encore. IsolĂ©, sans ami ni personne qui s’intĂ©ressĂąt Ă  lui, jamais le baron ne recevait de lettre, et tout de suite cela lui parut un Ă©vĂ©nement de mauvais augure dont il y avait lieu de s’inquiĂ©ter. Quel Ă©tait ce mystĂ©rieux correspondant qui venait le relancer dans sa retraite ? – Il faut signer, monsieur le baron. Il signa en maugrĂ©ant. Puis il prit la lettre, attendit que le facteur eĂ»t disparu au tournant de la route, et aprĂšs avoir fait quelques pas de long en large, il s’appuya contre le parapet du pont et dĂ©chira l’enveloppe. Elle portait une feuille de papier quadrillĂ© avec cet en-tĂȘte manuscrit Prison de la SantĂ©, Paris. Il regarda la signature ArsĂšne Lupin. StupĂ©fait, il lut Monsieur le baron, Il y a, dans la galerie qui rĂ©unit vos deux salons, un tableau de Philippe de Champaigne d’excellente facture et qui me plaĂźt infiniment. Vos Rubens sont aussi de mon goĂ»t, ainsi que votre plus petit Watteau. Dans le salon de droite, je note la crĂ©dence Louis XIII, les tapisseries de Beauvais, le guĂ©ridon Empire signĂ© Jacob et le bahut Renaissance. Dans celui de gauche, toute la vitrine des bijoux et des miniatures. Pour cette fois, je me contenterai de ces objets qui seront, je crois, d’un Ă©coulement facile. Je vous prie donc de les faire emballer convenablement et de les expĂ©dier Ă  mon nom port payĂ©, en gare des Batignolles, avant huit jours
 faute de quoi, je ferai procĂ©der moi-mĂȘme Ă  leur dĂ©mĂ©nagement dans la nuit 28du mercredi 27 au jeudi 28 septembre. Et, comme de juste, je ne me contenterai pas des objets sus-indiquĂ©s. Veuillez excuser le petit dĂ©rangement que je vous cause, et accepter l’expression de mes sentiments de respectueuse considĂ©ration. ArsĂšne Lupin. » – Surtout ne pas m’envoyer le plus grand des Watteau. Quoique vous l’ayez payĂ© trente mille francs Ă  l’HĂŽtel des Ventes, ce n’est qu’une copie, l’original ayant Ă©tĂ© brĂ»lĂ©, sous le Directoire, par Barras, un soir d’orgie. Consulter les MĂ©moires inĂ©dits de Garat. Je ne tiens pas non plus Ă  la chĂątelaine Louis XV dont l’authenticitĂ© me semble douteuse. ». Cette lettre bouleversa le baron Cahorn. SignĂ©e de tout autre, elle l’eĂ»t dĂ©jĂ  considĂ©rablement alarmĂ©, mais signĂ©e d’ArsĂšne Lupin ! Lecteur assidu des journaux, au courant de tout ce qui se passait dans le monde en fait de vol et de crime, il n’ignorait rien des exploits de l’infernal cambrioleur. Certes, il savait que Lupin, arrĂȘtĂ© en AmĂ©rique par son ennemi Ganimard, Ă©tait bel et bien incarcĂ©rĂ©, que l’on instruisait son procĂšs – avec quelle peine ! Mais il savait aussi que l’on pouvait s’attendre Ă  tout de sa part. D’ailleurs, cette connaissance exacte du chĂąteau, de la disposition des tableaux et des meubles, Ă©tait un indice des plus redoutables. Qui l’avait renseignĂ© sur des choses que nul n’avait vues ? Le baron leva les yeux et contempla la silhouette farouche du Malaquis, son piĂ©destal abrupt, l’eau profonde qui l’entoure, 29et haussa les Ă©paules. Non, dĂ©cidĂ©ment, il n’y avait point de danger. Personne au monde ne pouvait pĂ©nĂ©trer jusqu’au sanctuaire inviolable de ses collections. Personne, soit, mais ArsĂšne Lupin ? Pour ArsĂšne Lupin, est- ce qu’il existe des portes, des ponts-levis, des murailles ? À quoi servent les obstacles les mieux imaginĂ©s, les prĂ©cautions les plus habiles, si ArsĂšne Lupin a dĂ©cidĂ© d’atteindre le but ? Le soir mĂȘme, il Ă©crivit au procureur de la RĂ©publique de Rouen. Il envoyait la lettre de menaces et rĂ©clamait aide et protection. La rĂ©ponse ne tarda point le nommĂ© ArsĂšne Lupin Ă©tant actuellement dĂ©tenu Ă  la SantĂ©, surveillĂ© de prĂšs, et dans l’impossibilitĂ© d’écrire, la lettre ne pouvait ĂȘtre que l’Ɠuvre d’un mystificateur. Tout le dĂ©montrait, la logique et le bon sens, comme la rĂ©alitĂ© des faits. Toutefois, et par excĂšs de prudence, on avait commis un expert Ă  l’examen de l’écriture, et l’expert dĂ©clarait que, malgrĂ© certaines analogies, cette Ă©criture n’était pas celle du dĂ©tenu. MalgrĂ© certaines analogies », le baron ne retint que ces trois mots effarants, oĂč il voyait l’aveu d’un doute qui, Ă  lui seul, aurait dĂ» suffire pour que la justice intervĂźnt. Ses craintes s’exaspĂ©rĂšrent. Il ne cessait de relire la lettre. Je ferai procĂ©der moi-mĂȘme au dĂ©mĂ©nagement. » Et cette date prĂ©cise la nuit du mercredi 27 au jeudi 28 septembre !
 Soupçonneux et taciturne, il n’avait pas osĂ© se confier Ă  ses domestiques, dont le dĂ©vouement ne lui paraissait pas Ă  l’abri de toute Ă©preuve. Cependant, pour la premiĂšre fois depuis des annĂ©es, il Ă©prouvait le besoin de parler, de prendre conseil. AbandonnĂ© par la justice de son pays, il n’espĂ©rait plus se dĂ©fendre avec ses propres ressources, et il fut sur le point d’aller 30jusqu’à Paris et d’implorer l’assistance de quelque ancien policier. Deux jours s’écoulĂšrent. Le troisiĂšme, en lisant ses journaux, il tressaillit de joie. Le RĂ©veil de Caudebec publiait cet entrefilet Nous avons le plaisir de possĂ©der dans nos murs, depuis bientĂŽt trois semaines, l’inspecteur principal Ganimard, un des vĂ©tĂ©rans du service de la SĂ»retĂ©. M. Ganimard, Ă  qui l’arrestation d’ArsĂšne Lupin, sa derniĂšre prouesse, a valu une rĂ©putation europĂ©enne, se repose de ses longues fatigues en taquinant le goujon et l’ablette. » Ganimard ! voilĂ  bien l’auxiliaire que cherchait le baron Cahorn ! Qui mieux que le retors et patient Ganimard saurait dĂ©jouer les projets de Lupin ? Le baron n’hĂ©sita pas. Six kilomĂštres sĂ©parent le chĂąteau de la petite ville de Caudebec. Il les franchit d’un pas allĂšgre, en homme que surexcite l’espoir du salut. AprĂšs plusieurs tentatives infructueuses pour connaĂźtre l’adresse de l’inspecteur principal, il se dirigea vers les bureaux du RĂ©veil, situĂ©s au milieu du quai. Il y trouva le rĂ©dacteur de l’entrefilet, qui, s’approchant de la fenĂȘtre, s’écria – Ganimard ? mais vous ĂȘtes sĂ»r de le rencontrer le long du quai, la ligne Ă  la main. C’est lĂ  que nous avons liĂ© connaissance, et que j’ai lu par hasard son nom gravĂ© sur sa canne Ă  pĂȘche. Tenez, le petit vieux que l’on aperçoit lĂ -bas, sous les arbres de la promenade. – En redingote et en chapeau de paille ? 31– Justement ! Ah ! un drĂŽle de type pas causeur et plutĂŽt bourru. Cinq minutes aprĂšs, le baron abordait le cĂ©lĂšbre Ganimard, se prĂ©sentait et tĂąchait d’entrer en conversation. N’y parvenant point, il aborda franchement la question et exposa son cas. L’autre Ă©couta, immobile, sans perdre de vue le poisson qu’il guettait, puis il tourna la tĂȘte vers lui, le toisa des pieds Ă  la tĂȘte d’un air de profonde pitiĂ©, et prononça – Monsieur, ce n’est guĂšre l’habitude de prĂ©venir les gens que l’on veut dĂ©pouiller. ArsĂšne Lupin, en particulier, ne commet pas de pareilles bourdes. – Cependant
 – Monsieur, si j’avais le moindre doute, croyez bien que le plaisir de fourrer encore dedans ce cher Lupin, l’emporterait sur toute autre considĂ©ration. Par malheur, ce jeune homme est sous les verrous. – S’il s’échappe ?
 – On ne s’échappe pas de la SantĂ©. – Mais lui
 – Lui pas plus qu’un autre. – Cependant
 32– Eh bien, s’il s’échappe, tant mieux, je le repincerai. En attendant, dormez sur vos deux oreilles, et n’effarouchez pas davantage cette ablette. La conversation Ă©tait finie. Le baron retourna chez lui, un peu rassurĂ© par l’insouciance de Ganimard. Il vĂ©rifia les serrures, espionna les domestiques, et quarante-huit heures se passĂšrent pendant lesquelles il arriva presque Ă  se persuader que, somme toute, ses craintes Ă©taient chimĂ©riques. Non, dĂ©cidĂ©ment, comme l’avait dit Ganimard, on ne prĂ©vient pas les gens que l’on veut dĂ©pouiller. La date approchait. Le matin du mardi, veille du 27, rien de particulier. Mais Ă  trois heures, un gamin sonna. Il apportait une dĂ©pĂȘche. Aucun colis en gare Batignolles. PrĂ©parez tout pour demain soir. ArsĂšne. » De nouveau, ce fut l’affolement, Ă  tel point qu’il se demanda s’il ne cĂ©derait pas aux exigences d’ArsĂšne Lupin. Il courut Ă  Caudebec. Ganimard pĂȘchait Ă  la mĂȘme place, assis sur un pliant. Sans un mot, il lui tendit le tĂ©lĂ©gramme. – Et aprĂšs ? fit l’inspecteur. – AprĂšs ? mais c’est pour demain ! – Quoi ? – Le cambriolage ! le pillage de mes collections ! 33Ganimard dĂ©posa sa ligne, se tourna vers lui, et, les deux bras croisĂ©s sur sa poitrine, s’écria d’un ton d’impatience – Ah ! ça, est-ce que vous vous imaginez que je vais m’occuper d’une histoire aussi stupide ! – Quelle indemnitĂ© demandez-vous pour passer au chĂąteau la nuit du 27 au 28 septembre ? – Pas un sou, fichez-moi la paix. – Fixez votre prix, je suis riche, extrĂȘmement riche. La brutalitĂ© de l’offre dĂ©concerta Ganimard qui reprit, plus calme – Je suis ici en congĂ© et je n’ai pas le droit de me mĂȘler
 – Personne ne le saura. Je m’engage, quoi qu’il arrive, Ă  garder le silence. – Oh ! il n’arrivera rien. – Eh bien, voyons, trois mille francs, est-ce assez ? L’inspecteur huma une prise de tabac, rĂ©flĂ©chit, et laissa tomber – Soit. Seulement, je dois vous dĂ©clarer loyalement que c’est de l’argent jetĂ© par la fenĂȘtre. – Ça m’est Ă©gal. 34– En ce cas
 Et puis, aprĂšs tout, est-ce qu’on sait, avec ce diable de Lupin ! Il doit avoir Ă  ses ordres toute une bande
 Êtes-vous sĂ»r de vos domestiques ? – Ma foi
 – Alors, ne comptons pas sur eux. Je vais prĂ©venir par dĂ©pĂȘche deux gaillards de mes amis qui nous donneront plus de sĂ©curité  Et maintenant, filez, qu’on ne nous voie pas ensemble. À demain, vers les neuf heures. Le lendemain, date fixĂ©e par ArsĂšne Lupin, le baron Cahorn dĂ©crocha sa panoplie, fourbit ses armes, et se promena aux alentours du Malaquis. Rien d’équivoque ne le frappa. Le soir, Ă  huit heures et demie, il congĂ©dia ses domestiques. Ils habitaient une aile en façade sur la route, mais un peu en retrait, et tout au bout du chĂąteau. Une fois seul, il ouvrit doucement les quatre portes. AprĂšs un moment, il entendit des pas qui s’approchaient. Ganimard prĂ©senta ses deux auxiliaires, grands gars solides, au cou de taureau et aux mains puissantes, puis demanda certaines explications. S’étant rendu compte de la disposition des lieux, il ferma soigneusement et barricada toutes les issues par oĂč l’on pouvait pĂ©nĂ©trer dans les salles menacĂ©es. Il inspecta les murs, souleva les tapisseries, puis enfin il installa ses agents dans la galerie centrale. – Pas de bĂȘtises, hein ? On n’est pas ici pour dormir. À la moindre alerte, ouvrez les fenĂȘtres de la cour et appelez-moi. Attention aussi du cĂŽtĂ© de l’eau. Dix mĂštres de falaise droite, des diables de leur calibre, ça ne les effraye pas. Il les enferma, emporta les clefs, et dit au baron 35– Et maintenant, Ă  notre poste. Il avait choisi, pour y passer la nuit, une petite piĂšce pratiquĂ©e dans l’épaisseur des murailles d’enceinte, entre les deux portes principales, et qui Ă©tait, jadis, le rĂ©duit du veilleur. Un judas s’ouvrait sur le pont, un autre sur la cour. Dans un coin on apercevait comme l’orifice d’un puits. – Vous m’avez bien dit, monsieur le baron, que ce puits Ă©tait l’unique entrĂ©e des souterrains, et que, de mĂ©moire d’homme, elle est bouchĂ©e ? – Oui. – Donc, Ă  moins qu’il n’existe une autre issue ignorĂ©e de tous, sauf d’ArsĂšne Lupin, ce qui semble un peu problĂ©matique, nous sommes tranquilles. Il aligna trois chaises, s’étendit confortablement, alluma sa pipe et soupira – Vraiment, monsieur le baron, il faut que j’aie rudement envie d’ajouter un Ă©tage Ă  la maisonnette oĂč je dois finir mes jours, pour accepter une besogne aussi Ă©lĂ©mentaire. Je raconterai l’histoire Ă  l’ami Lupin, il se tiendra les cĂŽtes de rire. Le baron ne riait pas. L’oreille aux Ă©coutes, il interrogeait le silence avec une inquiĂ©tude croissante. De temps en temps il se penchait sur le puits et plongeait dans le trou bĂ©ant un Ɠil anxieux. Onze heures, minuit, une heure sonnĂšrent. 36Soudain, il saisit le bras de Ganimard qui se rĂ©veilla en sursaut. – Vous entendez ? – Oui. – Qu’est-ce que c’est ? – C’est moi qui ronfle. – Mais non, Ă©coutez
 – Ah ! parfaitement, c’est la corne d’une automobile. – Eh bien ? – Eh bien ! il est peu probable que Lupin se serve d’une automobile comme d’un bĂ©lier pour dĂ©molir votre chĂąteau. Aussi, monsieur le baron, Ă  votre place, je dormirais
 comme je vais avoir l’honneur de le faire Ă  nouveau. Bonsoir. Ce fut la seule alerte. Ganimard put reprendre son somme interrompu, et le baron n’entendit plus que son ronflement sonore et rĂ©gulier. Au petit jour, ils sortirent de leur cellule. Une grande paix sereine, la paix du matin au bord de l’eau fraĂźche, enveloppait le chĂąteau. Cahorn radieux de joie, Ganimard toujours paisible, ils montĂšrent l’escalier. Aucun bruit. Rien de suspect. – Que vous avais-je dit, monsieur le baron ? Au fond, je n’aurais pas dĂ» accepter
 Je suis honteux
 37Il prit les clefs et entra dans la galerie. Sur deux chaises, courbĂ©s, les bras ballants, les deux agents dormaient. – Tonnerre de nom d’un chien ! grogna l’inspecteur. Au mĂȘme instant, le baron poussait un cri – Les tableaux !
 la crĂ©dence !
 Il balbutiait, suffoquait, la main tendue vers les places vides, vers les murs dĂ©nudĂ©s oĂč pointaient les clous, oĂč pendaient les cordes inutiles. Le Watteau, disparu ! Les Rubens, enlevĂ©s ! Les tapisseries, dĂ©crochĂ©es ! Les vitrines, vidĂ©es de leurs bijoux ! – Et mes candĂ©labres Louis XVI !
 et le chandelier du RĂ©gent et ma Vierge du douziĂšme !
 Il courait d’un endroit Ă  l’autre, effarĂ©, dĂ©sespĂ©rĂ©. Il rappelait ses prix d’achat, additionnait les pertes subies, accumulait des chiffres, tout cela pĂȘle-mĂȘle, en mots indistincts, en phrases inachevĂ©es. Il trĂ©pignait, il se convulsait, fou de rage et de douleur. On aurait dit un homme ruinĂ© qui n’a plus qu’à se brĂ»ler la cervelle. Si quelque chose eĂ»t pu le consoler, c’eĂ»t Ă©tĂ© de voir la stupeur de Ganimard. Contrairement au baron, l’inspecteur ne bougeait pas, lui. Il semblait pĂ©trifiĂ©, et d’un Ɠil vague, il examinait les choses. Les fenĂȘtres ? fermĂ©es. Les serrures des portes ? intactes. Pas de brĂšche au plafond. Pas de trou au plancher. L’ordre Ă©tait parfait. Tout cela avait dĂ» s’effectuer mĂ©thodiquement, d’aprĂšs un plan inexorable et logique. 38– ArsĂšne Lupin
 ArsĂšne Lupin, murmura-t-il, effondrĂ©. Soudain, il bondit sur les deux agents, comme si la colĂšre enfin le secouait, et il les bouscula furieusement et les injuria, Ils ne se rĂ©veillĂšrent point ! – Diable, fit-il, est-ce que par hasard ?
 Il se pencha sur eux, et, tour Ă  tour, les observa avec attention ils dormaient, mais d’un sommeil qui n’était pas naturel. Il dit au baron – On les a endormis. – Mais qui ? – Eh ! lui, parbleu !
 ou sa bande, mais dirigĂ©e par lui, C’est un coup de sa façon. La griffe y est bien. – En ce cas, je suis perdu, rien Ă  faire. – Rien Ă  faire. – Mais c’est abominable, c’est monstrueux. – DĂ©posez une plainte. – À quoi bon ? – Dame ! essayez toujours
 la justice a des ressources
 39– La justice ! mais vous voyez bien par vous-mĂȘme
 Tenez, en ce moment, oĂč vous pourriez chercher un indice, dĂ©couvrir quelque chose, vous ne bougez mĂȘme pas. – DĂ©couvrir quelque chose, avec ArsĂšne Lupin ! Mais, mon cher monsieur, ArsĂšne Lupin ne laisse jamais rien derriĂšre lui ! Il n’y a pas de hasard avec ArsĂšne Lupin ! J’en suis Ă  me demander si ce n’est pas volontairement qu’il s’est fait arrĂȘter par moi, en AmĂ©rique ! – Alors, je dois renoncer Ă  mes tableaux, Ă  tout ! Mais ce sont les perles de ma collection qu’il m’a dĂ©robĂ©es. Je donnerais une fortune pour les retrouver. Si on ne peut rien contre lui, qu’il dise son prix ! Ganimard le regarda fixement. – Ça, c’est une parole sensĂ©e. Vous ne la retirez pas ? – Non, non, non. Mais pourquoi ? – Une idĂ©e que j’ai. – Quelle idĂ©e ? – Nous en reparlerons si l’enquĂȘte n’aboutit pas
 Seulement, pas un mot de moi, si vous voulez que je rĂ©ussisse. Il ajouta entre ses dents – Et puis, vrai, je n’ai pas de quoi me vanter. Les deux agents reprenaient peu Ă  peu connaissance, avec cet air hĂ©bĂ©tĂ© de ceux qui sortent du sommeil hypnotique. Ils 40ouvraient des yeux Ă©tonnĂ©s, ils cherchaient Ă  comprendre. Quand Ganimard les interrogea, ils ne se souvenaient de rien. – Cependant, vous avez dĂ» voir quelqu’un ? – Non. – Rappelez-vous ? – Non, non. – Et vous n’avez pas bu ? Ils rĂ©flĂ©chirent, et l’un d’eux rĂ©pondit – Si, moi j’ai bu un peu d’eau. – De l’eau de cette carafe ? – Oui. – Moi aussi, dĂ©clara le second. Ganimard la sentit, la goĂ»ta. Elle n’avait aucun goĂ»t spĂ©cial, aucune odeur. – Allons, fit-il, nous perdons notre temps. Ce n’est pas en cinq minutes que l’on rĂ©sout les problĂšmes posĂ©s par ArsĂšne Lupin. Mais, morbleu, je jure bien que je le repincerai. Il gagne la seconde manche. À moi la belle ! Le jour mĂȘme, une plainte en vol qualifiĂ© Ă©tait dĂ©posĂ©e par le baron Cahorn contre ArsĂšne Lupin, dĂ©tenu Ă  la SantĂ© ! 41Cette plainte, le baron la regretta souvent quand il vit le Malaquis livrĂ© aux gendarmes, au procureur, au juge d’instruction, aux journalistes, Ă  tous les curieux qui s’insinuent partout oĂč ils ne devraient pas ĂȘtre. L’affaire passionnait dĂ©jĂ  l’opinion. Elle se produisait dans des conditions si particuliĂšres, le nom d’ArsĂšne Lupin excitait Ă  tel point les imaginations, que les histoires les plus fantaisistes remplissaient les colonnes des journaux et trouvaient crĂ©ance auprĂšs du public. Mais la lettre initiale d’ArsĂšne Lupin, que publia l’Écho de France et nul ne sut jamais qui en avait communiquĂ© le texte, cette lettre oĂč le baron Cahorn Ă©tait effrontĂ©ment prĂ©venu de ce qui le menaçait, causa une Ă©motion considĂ©rable. AussitĂŽt des explications fabuleuses furent proposĂ©es. On rappela l’existence des fameux souterrains. Et le Parquet, influencĂ©, poussa ses recherches dans ce sens. On fouilla le chĂąteau du haut en bas. On questionna chacune des pierres. On Ă©tudia les boiseries et les cheminĂ©es, les cadres des glaces et les poutres des plafonds. À la lueur des torches on examina les caves immenses oĂč les seigneurs du Malaquis entassaient jadis leurs munitions et leurs provisions. On sonda les entrailles du rocher. Ce fut vainement. On ne dĂ©couvrit pas le moindre vestige de souterrain. Il n’existait point de passage secret. Soit, rĂ©pondait-on de tous cĂŽtĂ©s, mais des meubles et des tableaux ne s’évanouissent pas comme des fantĂŽmes. Cela s’en va par des portes et par des fenĂȘtres, et les gens qui s’en emparent s’introduisent et s’en vont Ă©galement par des portes et des fenĂȘtres. Quels sont ces gens ? Comment se sont-ils introduits ? Et comment s’en sont-ils allĂ©s ? 42Le parquet de Rouen, convaincu de son impuissance, sollicita le secours d’agents parisiens. M. Dudouis, le chef de la SĂ»retĂ©, envoya ses meilleurs limiers de la brigade de fer. Lui- mĂȘme fit un sĂ©jour de quarante-huit heures au Malaquis. Il ne rĂ©ussit pas davantage. C’est alors qu’il manda l’inspecteur Ganimard dont il avait eu si souvent l’occasion d’apprĂ©cier les services. Ganimard Ă©couta silencieusement les instructions de son supĂ©rieur, puis, hochant la tĂȘte, il prononça – Je crois que l’on fait fausse route en s’obstinant Ă  fouiller le chĂąteau. La solution est ailleurs. – Et oĂč donc ? – AuprĂšs d’ArsĂšne Lupin. – AuprĂšs d’ArsĂšne Lupin ! Supposer cela, c’est admettre son intervention. – Je l’admets. Bien plus, je la considĂšre comme certaine. – Voyons, Ganimard, c’est absurde. ArsĂšne Lupin est en prison. – ArsĂšne Lupin est en prison, soit. Il est surveillĂ©, je vous l’accorde. Mais il aurait les fers aux pieds, les cordes aux poignets et un bĂąillon sur la bouche, que je ne changerais pas d’avis. – Et pourquoi cette obstination ? 43– Parce que, seul, ArsĂšne Lupin est de taille Ă  combiner une machination de cette envergure, et Ă  la combiner de telle façon qu’elle rĂ©ussisse
 comme elle a rĂ©ussi. – Des mots, Ganimard ! – Qui sont des rĂ©alitĂ©s. Mais voilĂ , qu’on ne cherche pas de souterrain, de pierres tournant sur un pivot, et autres balivernes de ce calibre. Notre individu n’emploie pas des procĂ©dĂ©s aussi vieux jeu. Il est d’aujourd’hui, ou plutĂŽt de demain. – Et vous concluez ? – Je conclus en vous demandant nettement l’autorisation de passer une heure avec lui. – Dans sa cellule ? – Oui. Au retour d’AmĂ©rique nous avons entretenu, pendant la traversĂ©e, d’excellents rapports, et j’ose dire qu’il a quelque sympathie pour celui qui a su l’arrĂȘter. S’il peut me renseigner sans se compromettre, il n’hĂ©sitera pas Ă  m’éviter un voyage inutile. Il Ă©tait un peu plus de midi lorsque Ganimard fut introduit dans la cellule d’ArsĂšne Lupin. Celui-ci, Ă©tendu sur son lit, leva la tĂȘte et poussa un cri de joie. – Ah ! ça, c’est une vraie surprise. Ce cher Ganimard, ici ! – Lui-mĂȘme. 44– Je dĂ©sirais bien des choses dans la retraite que j’ai choisie
 mais aucune plus passionnĂ©ment que de t’y recevoir. – Trop aimable. – Mais non, mais non, je professe pour toi la plus vive estime. – J’en suis fier. – Je l’ai toujours prĂ©tendu Ganimard est notre meilleur dĂ©tective. Il vaut presque – tu vois que je suis franc – il vaut presque Sherlock Holmes. Mais, en vĂ©ritĂ©, je suis dĂ©solĂ© de n’avoir Ă  t’offrir que cet escabeau. Et pas un rafraĂźchissement ! pas un verre de biĂšre ! Excuse-moi, je suis lĂ  de passage. Ganimard s’assit en souriant, et le prisonnier reprit, heureux de parler – Mon Dieu, que je suis content de reposer mes yeux sur la figure d’un honnĂȘte homme ! J’en ai assez de toutes ces faces d’espions et de mouchards qui passent dix fois par jour la revue de mes poches et de ma modeste cellule, pour s’assurer que je ne prĂ©pare pas une Ă©vasion. Fichtre, ce que le gouvernement tient Ă  moi !
 – Il a raison. – Mais non ! je serais si heureux qu’on me laissĂąt vivre dans mon petit coin ! – Avec les rentes des autres. 45– N’est-ce pas ? Ce serait si simple ! Mais je bavarde, je dis des bĂȘtises, et tu es peut-ĂȘtre pressĂ©. Allons au fait, Ganimard ! Qu’est-ce qui me vaut l’honneur d’une visite ? – L’affaire Cahorn, dĂ©clara Ganimard, sans dĂ©tour. – Halte-lĂ  ! une seconde
 C’est que j’en ai tant, d’affaires ! Que je trouve d’abord dans mon cerveau le dossier de l’affaire Cahorn
 Ah ! voilĂ , j’y suis. Affaire Cahorn, chĂąteau du Malaquis, Seine-InfĂ©rieure
 Deux Rubens, un Watteau, et quelques menus objets. – Menus ! – Oh ! ma foi, tout cela est de mĂ©diocre importance. Il y a mieux Mais il suffit que l’affaire t’intĂ©resse
 Parle donc, Ganimard. – Dois-je t’expliquer oĂč nous en sommes de l’instruction ? – Inutile. J’ai lu les journaux de ce matin. Je me permettrai mĂȘme de te dire que vous n’avancez pas vite. – C’est prĂ©cisĂ©ment la raison pour laquelle je m’adresse Ă  ton obligeance. – EntiĂšrement Ă  tes ordres. – Tout d’abord ceci l’affaire a bien Ă©tĂ© conduite par toi ? – Depuis A jusqu’à Z. – La lettre d’avis ? le tĂ©lĂ©gramme ? 46– Sont de ton serviteur. Je dois mĂȘme en avoir quelque part les rĂ©cĂ©pissĂ©s. ArsĂšne ouvrit le tiroir d’une petite table en bois blanc qui composait, avec le lit et l’escabeau, tout le mobilier de la cellule, y prit deux chiffons de papier et les tendit Ă  Ganimard. – Ah ! ça mais, s’écria celui-ci, je te croyais gardĂ© Ă  vue et fouillĂ© pour un oui ou pour un non. Or tu lis les journaux, tu collectionnes les reçus de la poste
 – Bah ! ces gens sont si bĂȘtes ! Ils dĂ©cousent la doublure de ma veste, ils explorent les semelles de mes bottines, ils auscultent les murs de cette piĂšce, mais pas un n’aurait l’idĂ©e qu’ArsĂšne Lupin soit assez niais pour choisir une cachette aussi facile. C’est bien lĂ -dessus que j’ai comptĂ©. Ganimard, amusĂ©, s’exclama – Quel drĂŽle de garçon ! Tu me dĂ©concertes. Allons, raconte-moi l’aventure. – Oh ! oh ! comme tu y vas ! T’initier Ă  tous mes secrets
 te dĂ©voiler mes petits trucs
 C’est bien grave. – Ai-je eu tort de compter sur ta complaisance ? – Non, Ganimard, et puisque tu insistes
 ArsĂšne Lupin arpenta deux ou trois fois sa chambre, puis s’arrĂȘtant – Que penses-tu de ma lettre au baron ? 47– Je pense que tu as voulu te divertir, Ă©pater un peu la galerie. – Ah ! voilĂ , Ă©pater la galerie ! Eh bien, je t’assure, Ganimard, que je te croyais plus fort. Est-ce que je m’attarde Ă  ces puĂ©rilitĂ©s, moi, ArsĂšne Lupin ! Est-ce que j’aurais Ă©crit cette lettre, si j’avais pu dĂ©valiser le baron sans lui Ă©crire ? Mais comprends donc, toi et les autres, que cette lettre est le point de dĂ©part indispensable, le ressort qui a mis toute la machination en branle. Voyons, procĂ©dons par ordre, et prĂ©parons ensemble, si tu veux, le cambriolage du Malaquis. – Je t’écoute. Donc, supposons un chĂąteau rigoureusement fermĂ©, barricadĂ©, comme l’était celui du baron Cahorn. Vais-je abandonner la partie et renoncer Ă  des trĂ©sors que je convoite, sous prĂ©texte que le chĂąteau qui les contient est inaccessible ? – Évidemment non. – Vais-je tenter l’assaut comme autrefois, Ă  la tĂȘte d’une troupe d’aventuriers ? – Enfantin ! – Vais-je m’y introduire sournoisement ? – Impossible. – Reste un moyen, l’unique Ă  mon avis, c’est de me faire inviter par le propriĂ©taire dudit chĂąteau. – Le moyen est original. 48– Et combien facile ! Supposons qu’un jour, ledit propriĂ©taire reçoive une lettre, l’avertissant de ce que trame contre lui un nommĂ© ArsĂšne Lupin, cambrioleur rĂ©putĂ©. Que fera-t-il ? – Il enverra la lettre au procureur. – Qui se moquera de lui, puisque ledit Lupin est actuellement sous les verrous. Donc, affolement du bonhomme, lequel est tout prĂȘt Ă  demander secours au premier venu, n’est- il pas vrai ? – Cela est hors de doute. – Et s’il lui arrive de lire dans une feuille de chou qu’un policier cĂ©lĂšbre est en villĂ©giature dans la localitĂ© voisine
 – Il ira s’adresser Ă  ce policier. – Tu l’as dit. Mais, d’autre part, admettons qu’en prĂ©vision de cette dĂ©marche inĂ©vitable, ArsĂšne Lupin ait priĂ© l’un de ses amis les plus habiles de s’installer Ă  Caudebec, d’entrer en relations avec un rĂ©dacteur du RĂ©veil, journal auquel est abonnĂ© le baron, de laisser entendre qu’il est un tel, le policier cĂ©lĂšbre, qu’adviendra-t-il ? – Que le rĂ©dacteur annoncera dans Le RĂ©veil la prĂ©sence Ă  Caudebec dudit policier. – Parfait, et de deux choses l’une ou bien le poisson – je veux dire Cahorn – ne mord pas Ă  l’hameçon, et alors rien ne se passe. Ou bien, et c’est l’hypothĂšse la plus vraisemblable, il accourt, tout frĂ©tillant. Et voilĂ  donc mon Cahorn implorant 49– De plus en plus original. – Bien entendu, le pseudo-policier refuse d’abord son concours. LĂ -dessus, dĂ©pĂȘche d’ArsĂšne Lupin. Épouvante du baron qui supplie de nouveau mon ami, et lui offre tant pour veiller Ă  son salut. Ledit ami accepte, amĂšne deux gaillards de notre bande, qui, la nuit, pendant que Cahorn est gardĂ© Ă  vue par son protecteur, dĂ©mĂ©nagent par la fenĂȘtre un certain nombre d’objets et les laissent glisser, Ă  l’aide de cordes, dans une bonne petite chaloupe affrĂ©tĂ©e ad hoc. C’est simple comme Lupin. – Et c’est tout bĂȘtement merveilleux, s’écria Ganimard, et je ne saurais trop louer la hardiesse de la conception et l’ingĂ©niositĂ© des dĂ©tails. Mais je ne vois guĂšre de policier assez illustre pour que son nom ait pu attirer, suggestionner le baron Ă  ce point. Il y en a un, et il n’y en a qu’un. Lequel ? Celui du plus illustre, de l’ennemi personnel d’ArsĂšne Lupin, bref, de l’inspecteur Ganimard. – Moi ! – Toi-mĂȘme, Ganimard. Et voilĂ  ce qu’il y a de dĂ©licieux si tu vas lĂ -bas et que le baron se dĂ©cide Ă  causer, tu finiras par dĂ©couvrir que ton devoir est de t’arrĂȘter toi-mĂȘme, comme tu m’as arrĂȘtĂ© en AmĂ©rique. Hein ! la revanche est comique je fais arrĂȘter Ganimard par Ganimard ! 50ArsĂšne Lupin riait de bon cƓur. L’inspecteur, assez vexĂ©, se mordait les lĂšvres. La plaisanterie ne lui semblait pas mĂ©riter de tels accĂšs de joie. L’arrivĂ©e d’un gardien lui donna le loisir de se remettre. L’homme apportait le repas qu’ArsĂšne Lupin, par faveur spĂ©ciale, faisait venir du restaurant voisin. Ayant dĂ©posĂ© le plateau sur la table, il se retira. ArsĂšne s’installa, rompit son pain, en mangea deux ou trois bouchĂ©es et reprit – Mais sois tranquille, mon cher Ganimard, tu n’iras pas lĂ - bas. Je vais te rĂ©vĂ©ler une chose qui te stupĂ©fiera l’affaire Cahorn est sur le point d’ĂȘtre classĂ©e. – Hein ? – Sur le point d’ĂȘtre classĂ©e, te dis-je. – Allons donc, je quitte Ă  l’instant le chef de la SĂ»retĂ©. – Et aprĂšs ? Est-ce que M. Dudouis en sait plus long que moi sur ce qui me concerne ? Tu apprendras que Ganimard – excuse-moi – que le pseudo-Ganimard est restĂ© en fort bons termes avec le baron. Celui-ci, et c’est la raison principale pour laquelle il n’a rien avouĂ©, l’a chargĂ© de la trĂšs dĂ©licate mission de nĂ©gocier avec moi une transaction, et Ă  l’heure prĂ©sente, moyennant une certaine somme, il est probable que le baron est rentrĂ© en possession de ses chers bibelots. En retour de quoi, il retirera sa plainte. Donc, plus de vol. Donc, il faudra bien que le parquet abandonne
 Ganimard considĂ©ra le dĂ©tenu d’un air stupĂ©fait. – Et comment sais-tu tout cela ? 51– Je viens de recevoir la dĂ©pĂȘche que j’attendais. – Tu viens de recevoir une dĂ©pĂȘche ? – À l’instant, cher ami. Par politesse, je n’ai pas voulu la lire en ta prĂ©sence. Mais si tu m’y autorises
 – Tu te moques de moi, Lupin. – Veuille, mon cher ami, dĂ©capiter doucement cet Ɠuf Ă  la coque. Tu constateras par toi-mĂȘme que je ne me moque pas de toi. Machinalement, Ganimard obĂ©it, et cassa l’Ɠuf avec la lame d’un couteau. Un cri de surprise lui Ă©chappa. La coque vide contenait une feuille de papier bleu. Sur la priĂšre d’ArsĂšne, il la dĂ©plia. C’était un tĂ©lĂ©gramme, ou plutĂŽt une partie de tĂ©lĂ©gramme auquel on avait arrachĂ© les indications de la poste. Il lut Accord conclu. Cent mille balles livrĂ©es. Tout va bien. » – Cent mille balles ? fit-il. – Oui, cent mille francs ! C’est peu, mais enfin les temps sont durs
 Et j’ai des frais gĂ©nĂ©raux si lourds ! Si tu connaissais mon budget
 un budget de grande ville ! Ganimard se leva. Sa mauvaise humeur s’était dissipĂ©e. Il rĂ©flĂ©chit quelques secondes, embrassa d’un coup d’Ɠil toute l’affaire, pour tĂącher d’en dĂ©couvrir le point faible. Puis il prononça d’un ton oĂč il laissait franchement percer son admiration de connaisseur 52– Par bonheur, il n’en existe pas des douzaines comme toi, sans quoi il n’y aurait plus qu’à fermer boutique. ArsĂšne Lupin prit un petit air modeste et rĂ©pondit – Bah ! il fallait bien se distraire, occuper ses loisirs
 d’autant que le coup ne pouvait rĂ©ussir que si j’étais en prison. – Comment ! s’exclama Ganimard, ton procĂšs, ta dĂ©fense, l’instruction, tout cela ne te suffit donc pas pour te distraire ? – Non, car j’ai rĂ©solu de ne pas assister Ă  mon procĂšs. – Oh ! oh ! ArsĂšne Lupin rĂ©pĂ©ta posĂ©ment – Je n’assisterai pas Ă  mon procĂšs. – En vĂ©ritĂ© ! – Ah ça, mon cher, t’imagines-tu que je vais pourrir sur la paille humide ? Tu m’outrages. ArsĂšne Lupin ne reste en prison que le temps qu’il lui plaĂźt, et pas une minute de plus. – Il eĂ»t peut-ĂȘtre Ă©tĂ© plus prudent de commencer par ne pas y entrer, objecta l’inspecteur d’un ton ironique. – Ah ! monsieur raille ? monsieur se souvient qu’il a eu l’honneur de procĂ©der Ă  mon arrestation ? Sache, mon respectable ami, que personne, pas plus toi qu’un autre, n’eĂ»t pu mettre la main sur moi, si un intĂ©rĂȘt beaucoup plus considĂ©rable ne m’avait sollicitĂ© Ă  ce moment critique.
LaClasse à la maison vous propose de découvrir les neuf premiÚres nouvelles d' ArsÚne Lupin, gentleman-cambrioleur . Vous trouverez 9 nouvelles à lire avec une fiche de lecture pdf à remplir Un glossaire Une médiagraphie La liste des
Vous ĂȘtes ici Accueil Livres Romans ArsĂšne Lupin, gentleman cambrioleur Voir un extrait de ArsĂšne Lupin, gentleman cambrioleur Acheter ArsĂšne Lupin, gentleman cambrioleur Prix 0,99 € Les origines d'ArsĂšne LupinLa personnalitĂ© d'ArsĂšne LupinLes neuf nouvelles fondatrices ArsĂšne Lupin, gentleman cambrioleur » est un livre de Maurice Leblanc, comportant neuf nouvelles parues en 1907 dans Je sais tout », le magazine de Pierre Lafitte. C'est le livre fondateur de la sĂ©rie des ArsĂšne Lupin, laquelle comportera au total quarante nouvelles, seize romans et trois piĂšces de théùtre. Les origines d'ArsĂšne Lupin On a souvent posĂ© la question Ă  Maurice Leblanc ; or, ses rĂ©ponses n'ont pas trop aidĂ©, ce qui fait partie du mystĂšre d'ailleurs, puisque la vĂ©ritable histoire de la rencontre entre Leblanc et Lupin, on la trouve dans Le sept de cƓur », une des nouvelles du premier recueil dont nous parlons ici. Voici ce qu'il dit, le cachotier Comment est nĂ© ArsĂšne Lupin ? De tout un concours de circonstances. » Alors, ces circonstances, nous allons briĂšvement les passer en revue. Ce qui est amusant, dans la lupinologie, c'est l'effort bien français les Anglais font pareil, rassurons nous de gommer ou d'Ă©carter en multipliant les rĂ©fĂ©rences, l'origine la plus Ă©vidente et la plus probable de Lupin le gentleman cambrioleur Raffles, crĂ©ation de Ernest William Hornung. En effet, si les interprĂ©tations varient un peu, il est sĂ»r que Pierre Lafitte demande Ă  Leblanc, Ă  l'Ă©poque quasi inconnu d'inventer l'Ă©quivalent français de Raflles. Mais, deuxiĂšme influence, il est Ă©galement probable que Leblanc ait cherchĂ© dans Sherlock Holmes, mentionnĂ© dans l'une des premiĂšres nouvelles, un anti-hĂ©ros, un contre-modĂšle, dont il se serait servi pour crĂ©er Lupin. Voyons tout de mĂȘme un peu. Lupin devine, imagine, est crĂ©atif, visionnaire, tandis que Holmes a l'intelligence et la mĂ©moire prodigieuses, cherche, observe, dĂ©duit. Lupin plaĂźt aux femmes, les dĂ©sire, les aime, est un vrai gentleman chevaleresque, hĂ©ritier de l'amour courtois et d'une certaine tradition française de la sĂ©duction. Holmes est misogyne, et on ne lui connaĂźt mĂȘme pas de liaisons. De plus, sa sexualitĂ© est complexe, et ferait l'objet d'un autre billet. Lupin est gai, confiant, optimiste, un peu coq sur les bords, sociable, parfois presque trop confiant, cabotin, arrogant, Holmes est torturĂ©, vit enfermĂ©, prend de la cocaĂŻne, est un ĂȘtre malheureux mais Ă©galement moderne. Lupin a besoin du confort des hĂŽtels ou des chĂąteaux des riches, du contact de la nature, de l'air, de la mer, pour respirer, Holmes est dans son Ă©lĂ©ment dans les brumes du East End. Ainsi il y aurait une esthĂ©tique de Holmes comme il y a une pĂ©tulance de Lupin. Holmes est rĂ©el, si rĂ©el qu'il en est presque irrĂ©el, tandis que Lupin est si symbolique, esquissĂ© voir notre illustration originale qu'il en devient rĂ©el Ensuite, et c'est rarement mentionnĂ©, mais il y a Le voleur de Georges Darien qui inspira peut ĂȘtre Maurice Leblanc, avec son hĂ©ros, cynique, sombre, mais Ă©minemment moral, George Randal. Il est peu probable que le roman, paru en 1897, et remarquĂ© surtout par Jarry, n'ait pas bĂ©nĂ©ficiĂ© d'une certaine notoriĂ©tĂ© Ă  l'Ă©poque oĂč Leblanc est dĂ©jĂ  plongĂ© Ă  fond dans le monde littĂ©raire. Cela pourrait donc ĂȘtre une influence. QuatriĂšme influence, celle-ci, d'un personnage rĂ©el, Marius Jacob. Nous savons que Leblanc assiste Ă  son procĂšs Ă  Amiens en 1905, donc pas bien longtemps avant la crĂ©ation de Lupin. Cambrioleur anarchiste, Ă  la verve et Ă  l'humour lupinesques, gĂ©nĂ©reux, chevaleresque, Marius Jacob ne cambriolait pas seulement les riches, il laissait parfois sa carte de visite avec un mot savoureux. Quand on croise la date, la prĂ©sence de Leblanc journaliste Ă  un procĂšs cĂ©lĂšbre, Ă  une Ă©poque marquĂ©e par la mouvance anarchiste, et que l'on ajoute que Leblanc Ă©tait un libre-penseur aux idĂ©es de gauche, cela semble assez clair... CinquiĂšme influence, elle est trĂšs claire aussi, surtout dans les premiers pas d'ArsĂšne Lupin, comme dans ce recueil de nouvelles celle d'Edgar Allan Poe. D'abord Leblanc avoue cette influence. Et heureusement, car elle nous semble assez Ă©vidente quand on lit les neuf premiĂšres nouvelles ; l'Ă©criture, les situations, environnements cloisonnĂ©s, Ă©nigmes impossibles, part du mystĂšre touchant presque au fantastique, personnages structurĂ©s par l'intrigue et l'environnement... De plus, il existe un Auguste Dupin dans l'Ɠuvre de Poe, mais c'est peut ĂȘtre une coĂŻncidence. Enfin, on pourrait aussi citer Gaboriau, Vidocq dont la personnalitĂ© prĂ©sente certains traits communs avec Lupin, et puis Monte-Cristo... Retour en haut de pageLa personnalitĂ© d'ArsĂšne Lupin Impertinent, fantaisiste, insolent, rebelle, pĂ©tulant, optimiste, gouailleur, cabotin, ami des femmes, moral, chevaleresque, gĂ©nĂ©reux, crĂ©atif, passionnĂ©, courageux...sont juste certains des qualificatifs qui conviennent Ă  ArsĂšne Lupin. Comme le dit la phrase devenue cĂ©lĂšbre, ce n'est pas un aristocrate qui vit comme un anarchiste, mais un anarchiste qui vit comme un aristocrate. » La personnalitĂ© d'ArsĂšne Lupin, visionnaire, crĂ©atrice, extravertie, calculatrice, comporte Ă©videmment de nombreux aspects cachĂ©s, ce qui explique le goĂ»t de se grimer et de prendre de multiples personnalitĂ©s, pour dĂ©jouer la police et ses futures victimes dira t-on, mais aussi pour continuer Ă  refouler un passĂ© sombre. Ce passĂ©, nous ne le connaissons pas, mais nous pouvons le deviner celui d'un enfant sans pĂšre, aimant sa pĂšre, humiliĂ© par la sociĂ©tĂ© et meurtri par elle, qui tous les jours s'en venge, en en ignorant l'injuste systĂšme, et en contribuant par l'illĂ©galitĂ© Ă  rĂ©tablir un semblant de justice. Lupin est Ă  l'aise dans tous les milieux. TantĂŽt aristocrate, tantĂŽt voleur, il reprĂ©sente une morale plus vraie, qui ne s'encombre pas des faux-semblants et des passe-droits que procurent la situation sociale dans un monde oĂč les lois servent Ă  faciliter le pillage de la sociĂ©tĂ© par les privilĂ©giĂ©s. Lupin est populaire car il cristallise la fusion du caractĂšre joyeux, gouailleur et rebelle Ă  l'autoritĂ© avec l'Ă©lĂ©gance, le chevaleresque, dĂ©fenseur des grandes causes Ă  condition qu'elles soient humaines. En exemplifiant cette fusion des genres, Lupin reprĂ©sente tout ce que le Français voudrait ĂȘtre, et rĂȘve d'avoir Ă©tĂ©. Plus malin que D'Artagnan, plus drĂŽle que Monte-Cristo, plus heureux que Jean Valjean, Lupin est probablement notre hĂ©ros. ArsĂšne Lupin promĂšne sa lĂ©gende au cours de la Belle Epoque » et pendant les AnnĂ©es folles ». Il est le pendant gai de la Belle Epoque. Impertinent, redresseur de torts, anarchiste aristocrate, il n'en est pas l'antinomie, il en est probablement l'antidote. Retour en haut de pageLes neuf nouvelles fondatrices L'arrestation d'ArsĂšne Lupin sur un paquebot transatlantique, on apprend que Lupin se dissimule parmi les passagers. Surprise, on finit par l'arrĂȘter. ArsĂšne Lupin en prison le baron Cahorn, un personnage peu recommandable, est prĂ©venu Ă  l'avance par ArsĂšne Lupin, toujours en prison, de la date et des objets qui lui seront dĂ©robĂ©s. L'Ă©vasion d'ArsĂšne Lupin le procĂšs d'ArsĂšne Lupin s'approche ; il a prĂ©venu qu'il n'y assisterait pas. S'en suit l'une des Ă©vasions les plus pittoresques de la littĂ©rature. Le mystĂ©rieux voyageur ArsĂšne Lupin seul dans un compartiment, avec une dame craintive. Il est agressĂ©, volĂ©, mais avec l'aide de la police, il retrouvera son agresseur, et lui fera payer. Le collier de la reine un vol type chambre close », un vol inexpliquĂ©, une nouvelle trĂšs importante, puisque l'on devine qu'il pourrait s'agir lĂ  du premier vol de Lupin ĂągĂ© de neuf ans, Ă©mu de la pauvretĂ© abjecte dans laquelle la sociĂ©tĂ© injuste a plongĂ© sa mĂšre. Un regard rare sur le passĂ© de Lupin? Le sept de cƓur une complexe histoire d'espionnage, de sous-marin, de lettres d'amour dĂ©robĂ©es, une cachette dans une maison particuliĂšre, le meurtre inexpliquĂ© d'un jeune ingĂ©nieur, et aussi une autre nouvelle fondatrice, puisqu'elle raconte la rencontre de Maurice Leblanc et de Lupin. Le coffre-fort de Madame Imbert une trĂšs belle machination qui permet Ă  Lupin de mettre la main sur les titres de Madame Imbert. Un Ă©vĂšnement, puisque Lupin s'y fait duper! La perle noire ArsĂšne Lupin veut dĂ©rober une perle et dĂ©couvre un cadavre. Encore une fois un dĂ©but avec une ambiance Ă  la Poe. Lupin est encore trĂšs cambrioleur gĂ©nial, et moins emberlificoteur de grande envergure. Herlock Sholmes arrive trop tard premiĂšre apparition du cĂ©lĂšbre dĂ©tective qui s'affronte Ă  ArsĂšne Lupin, lequel doit dĂ©couvrir le secret d'un chĂąteau normand, secret qui date de la RĂ©volution. © 2012- Les Editions de Londres Voir un extrait de ArsĂšne Lupin, gentleman cambrioleur Acheter ArsĂšne Lupin, gentleman cambrioleur 0,99 € Retour en haut de page Avis d'un lecteur
ArsĂšneLupin, Gentleman-Cambrioleur Maurice Leblanc Folio. Prix public : 6,60 € Dans Folioplus classiques, le texte intĂ©gral, enrichi d'une lecture d'image, Ă©cho pictural de l'Ɠuvre, est suivi de sa mise en perspective organisĂ©e en six points : ‱ VIE LITTÉRAIRE : Un hĂ©ros de la Belle Époque ‱ L’ÉCRIVAIN À SA TABLE DE TRAVAIL : ArsĂšne Lupin, bandit au grand cƓur
Accueil > Fiches de lecture > ArsĂšne Lupin, Gentleman cambrioleur Fiche de lecture publiĂ©e le 26 mai 2021, rĂ©digĂ©e par Eric Le Meur Maurice Leblanc. Je n’ai pas la prĂ©tention de vous faire dĂ©couvrir ArsĂšne Lupin, j’imagine que tout lecteur français a eu l’occasion, au moins une fois dans sa vie, de lire l’un des romans de Maurice Leblanc. En revanche, si, comme moi, cela fait un certain temps que vous n’avez pas ouvert l’une de ses aventures, je vous encouragerais Ă  le faire ma surprise fut trĂšs agrĂ©able. J’avoue, je l’ai pris un peu par paresse nous Ă©tions entre deux confinements, avec le couvre-feu Ă  18h, et j’avais besoin d’une lecture agrĂ©able qui finit bien ». ArsĂšne Lupin est un recueil de neuf histoires, qui, rassemblĂ©es, forment le premier tome des aventures d’ArsĂšne Lupin. Le style est agrĂ©able et, pourrait-on dire, n’a pas pris une ride. Enfin, presque. Certes, il n’y a pas de cadavre Ă  autopsier, il n’y a pas de policier psychopathe ou border line », mais le rythme de la phrase est bien tenu, ce qui n’est pas toujours le cas avec les vieux romans policiers. De plus, il y a une certaine grandeur » dans le rĂ©cit des aventures de Lupin nous avons lĂ  notre Robin des Bois français, qui vole pour nourrir les pauvres et faire triompher la justice. MaĂźtre dans l’art du dĂ©guisement, notre voleur est non-violent, intelligent, patriote, distingué  Un moment trĂšs agrĂ©able, et qui fera certainement la joie des plus jeunes et des plus grands !
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